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“Participer aux Jeux olympiques était un rêve”, Nicolas Delmotte (2/2)

Interviews jeudi 4 août 2022 Mélina Massias

Vainqueur de deux Grands Prix 5* l’année dernière avec son fidèle Urvoso du Roch, qui l’a également accompagné dans sa première aventure olympique, Nicolas Delmotte s’attache désormais à poursuivre la formation de quelques chevaux prometteurs. Parmi eux, et autour des tout bon Citadin du Chatellier et Ilex VP, se trouve une certaine Dallas Vegas Batilly, sur laquelle il espère compter d’abord pour les Européens de Milan en 2023, puis surtout pour les Jeux de Paris en 2024. Discrètement, et sans jamais faire de vague, le sympathique Nordiste poursuit sa route, toujours bien entouré par ses propriétaires, ses montures, mais aussi son associé dans de nombreux projets, Laurent Guillet. Entre son piquet de chevaux actuel, sa première expérience olympique, son passif d’éleveur mais aussi le bien-être animal, le jeune quadragénaire n’a éludé aucune question. Second des deux volets de cet entretien. 

La première partie de cette interview est à (re)lire ici.

Citadin, Rachel, Denerys et Dallas auront douze ou onze ans en 2024, soit l’âge idéal pour disputer une échéance majeure. Pensez-vous aux Jeux olympiques, qui auront lieu à Paris, dans deux ans ?

Oui, bien sûr, j’y pense. Aujourd’hui, si on me demande de définir un objectif précis avec un cheval, ce serait celui-ci, avec Dallas. Si on se projette sur l’année prochaine, et sans être prétentieux, on visera peut-être les championnats d’Europe (qui auront lieu à Milan, ndlr). J’aurai cela en ligne de mire, puis les Jeux de 2024. La jument est déjà sans-faute dans le Grand Prix 5* de La Baule, dans la Coupe des nations CSIO 3* de Deauville, quatrième du Grand Prix du vendredi à Aix-la-Chapelle, etc. Elle confirme qu’elle est très bonne. Ici, à Dinard, je lui ai préféré Ilex pour le 5*, afin de prendre le temps de poursuivre sa formation, sans trop lui tirer dessus.

Dallas Vegas Batilly sur le fameux double de bidets d'Aix-la-Chapelle. © Mélina Massias

À froid, quelle analyse tirez-vous de vos premiers Jeux olympiques, que vous avez disputés il y a maintenant un an, à Tokyo, et qui se sont arrêtés prématurément en raison d’un épisode de coliques pour Urvoso ?

Cela m’a donné beaucoup d’expérience. Il s’agissait de mes premiers Jeux. Je suis forcément déçu, par rapport à cet incident, d’autant plus qu’Urvoso n’avait jamais été malade avant. De ce fait, je regrette un peu de ne pas avoir disputé l’épreuve par équipes. Mais cela reste une bonne expérience. J’ai quand même été en finale, Urvoso était sans-faute, puis nous avons concédé une faute en finale. J’étais content de lui. En tant que compétiteur, j’aurais évidemment aimé tenter ma chance au barrage, mais participer aux Jeux olympiques était un rêve.

Beaucoup d’encre a coulé après cette édition des Jeux olympiques, spéciale à bien des égards. Personnellement, qu’en avez-vous pensé ?

Le problème principal réside dans la réduction des équipes à trois couples. On parle du bien-être du cheval, mais lorsqu’un incident survient avec un cheval dans ce contexte, on ne peut pas abandonner, sinon c’est la catastrophe. C’est pour cela que nous avons vu quelques parcours qui se déroulaient moins bien. Ce n’est pas la faute des cavaliers ; pour la compétition, on était obligé d’aller jusqu’au bout. Ce format ne va pas du tout.

Nicolas Delmotte et son fidèle Urvoso à Tokyo. © Scoopdyga

“L’élevage requiert une vraie passion et beaucoup de patience”

Quel regard portez-vous sur le bien-être animal, de plus en plus évoqué dans les sports équestres ?

Quand on voit le temps que nous passons autour de nos chevaux et comment nous prenons soin d’eux, on se dit qu’ils sont souvent mieux soignés que certains êtres humains. Je peux comprendre les critiques formulées par des personnes qui ne connaissent pas notre milieu. Il ne faut pas être obtus et renier ces gens-là. Il faut de tout pour faire un monde. Mais, comme je l’ai déjà dit, je les invite à passer un mois aux côtés des cavaliers, afin qu’ils puissent voir comment nos chevaux sont traités comme des stars. Les camions sont de mieux en mieux, lorsqu’on arrive en concours les tout est prêt, et bientôt nous aurons un groom par cheval. Aujourd’hui, les questions de bien-être animal se sont modernisées et cet aspect du sport est très surveillé. En parlant de cette notion, on peut aussi évoquer les chiens, les chats et tous les animaux en général. Lorsqu’un incident se produit, il ne faut pas en faire une généralité. C’est comme pour tout désormais : quand quelque chose se passe, on a vite tendance à penser que tout le milieu est ainsi fait. Or, ce n’est pas toujours le cas. Il faut faire la part des choses.

Denerys du Montceau sur la rivière du Derby de Dinard. © Mélina Massias

Au milieu des années 2000, vous avez fait naître près d’une trentaine de chevaux sous l’affixe du Sartel, notamment issus de vos bonnes juments de concours, parmi lesquelles figure bien sûr votre chère Discrète IV, qui vous a permis d’être sacré champion de France en 2001. Depuis 2012, vous n’avez fait naître qu’un poulain, en 2021, issu de Dallas Vegas Batilly. Pourquoi avoir stoppé cette activité ?

J’ai fait un peu d'élevage pendant cinq ou six ans, puis je me suis rendu compte que je manquais de temps pour m’adonner à cette activité. Quelques-uns de mes poulains sont sortis en concours. Alice Vancrayelynghe monte d’ailleurs un très bon cheval, fils de Discrète et Coriano Zwartepannenhof, qui a déjà gagné un Grand Prix du Grand National (Volcan du Sartel s’est imposé à Cluny, en juin dernier, sur des barres à 1,50m, ndlr). J’avais beaucoup de produits et je ne pouvais plus tout faire. J’ai tout vendu et n’ai pas continué. Désormais, je préfère acheter des chevaux plutôt que de les faire naître. Laurent et moi avons effectivement fait un transfert d’embryon avec Dallas. Le poulain va avoir deux ans. C’est chouette. J’apprécie toujours regarder les étalons et j’encourage les éleveurs à produire des chevaux. C’est une activité qui requiert une vraie passion et beaucoup de patience, mais les éleveurs sont indispensables pour continuer à alimenter les cavaliers en montures. Et tout le monde, même les petits éleveurs, ont leur chance : si leurs chevaux tombent dans de bonnes et ont de la qualité, il n’y a pas de raison.

Volcan du Sartel, partenaire d'Alice Vancrayelynghe, est né chez Nicolas Delmotte. © Mélina Massias

La France a remporté la Coupe des nations de Hickstead, la troisième de la saison, et s’apprête à s’envoler pour les championnats du monde, à Herning. Comment jugez-vous cette équipe ?

C’est super. Ce sont encore d’autres couples qui se sont imposés en Angleterre. Voir la France gagner ou participer à une Coupe des nations est motivant. Il y a une bonne équipe. Toutefois, il ne faut pas oublier que nous sommes en reconstruction du côté des chevaux. Cela vaut pour toutes les nations : il y a des cycles. De nouveaux et bons chevaux arrivent, et nous avons des cavaliers compétents. Il faut du temps pour que tout se mette en place, mais ces victoires en Coupes des nations sont une bonne preuve que tout avance comme il faut.

En dehors des concours, trouvez-vous le temps de vous adonner à d’autres activités ?

Sincèrement, pas souvent ! Quand je ne monte pas, je prends la voiture pour aller voir des chevaux. Avec Laurent, nous partons régulièrement essayer des montures. Je n’ai pas trop le temps de faire autre chose à côté.

Nicolas Delmotte et son génial Citadin du Châtellier. © Mélina Massias

Photo à la Une : Nicolas Delmotte et Urvoso du Roch aux Jeux olympiques de Tokyo, l’été dernier. © Scoopdyga