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Beth Underhill triomphe pour la première fois de sa carrière sous le soleil de l’Officiel de France

Sport dimanche 8 mai 2022 Mélina Massias

Qui d’Éric Lamaze ou Beth Underhill a le plus savouré la victoire de la dernière citée dans le Grand Prix du CSIO 5* de La Baule ? Sans doute l’émotion était-elle partagée entre les deux Canadiens. Associée au puissant Dieu Merci van T&L, en qui Éric Lamaze fondait des espoirs olympiques, l’amazone a mis tout le monde d’accord en Loire-Atlantique, signant l’un des deux seuls double clear round de l’après-midi. Le second est à mettre au crédit de Yuri Mansur et son phénoménal Vitiki, véritable force de la nature. Pierre-Marie Friant et Grégory Wathelet, qui ont enregistré le même chronomètre dans la grande finale de cet Officiel de France, se partagent la troisième marche du podium avec leurs respectifs Urdy d’Astrée et Nevados S. 

“We got it!”, lance Éric Lamaze, resté collé contre la barrière de l’entrée de piste du splendide stade François André. Alors que Martin Fuchs, numéro deux mondial, lauréat la veille d’une belle épreuve à barrage, et impressionnant avec son phénoménal Conner Jei, déjà sacré dans le Grand Prix 5* de Dinard l’année dernière, vient de renverser une barre, le paddock s’agite déjà autour de Beth Underhill, qui, à bientôt soixante ans, enregistre le plus beau succès de sa carrière. Dimanche 8 mai, sous un soleil radieux, face à des tribunes pleines à craquer et sur un terrain d’une robe verte en parfait état après trois journées de compétition, le Canada s’est imposé de main de maître. Déjà double sans-faute dans la Coupe des nations vendredi, Beth Underhill a enfoncé le clou pour son retour à très haut niveau.

Beth Underhill et Dieu Merci.

Depuis plusieurs mois maintenant, l’amazone a pris en charge les montures d’Éric Lamaze, véritable légende de son sport, adoré du public et champion olympique en 2008 avec l’inoubliable Hickstead. Depuis la retraite sportive du pilote, qui officie désormais en tant que chef d’équipe, Beth s’est forgé un solide piquet de chevaux, grâce au soutien des écuries Torrey Pines. Peu connue en Europe, la cavalière a porté la veste rouge de son escouade nationale pour la première fois en 1990. Ayant pu compter sur deux excellents chevaux, Monopoly et Altaïr, avec qui elle s’est rendue aux Jeux olympiques, aux Jeux équestres mondiaux, en finale de la Coupe du monde ou encore aux Jeux panaméricains dans les années 90, Beth a ensuite pris un peu de recul avec le haut niveau, avant de retrouver Count Me In, désormais sous la selle de l’Irlandais Conor Swail. Si ce petit bai, qu’elle décrit elle-même comme difficile, lui a offert une victoire en Grand Prix 5*, à Crete, aux Etats-Unis, celle acquise aujourd’hui, dans une ambiance exceptionnelle, est sans aucun doute la plus belle de sa carrière.

La joie d'Eric Lamaze...

...qui n'a pas perdu la main pour ouvrir une bouteille de champagne !

Eric Lamaze et Beth Underhill.

“Je ne connais pas Dieu Merci depuis très longtemps. Nous évoluons ensemble depuis environ deux mois et il s’agissait de ma troisième épreuve à 1,60m avec lui. Il convient bien à ma façon de monter ; il est grand, puissant, avec une amplitude conséquente. Ce matin, je me promenais autour des stands, et je suis tombé sur les plaques où sont gravées les noms de tous les vainqueurs. J’ai vu celui d’Éric noté deux fois, avec Hickstead et Power Play. Je me suis alors dit ‘ne serait-ce pas formidable de faire partie de ce mur aussi ?’. En entrant en piste, Éric m’a dit ‘vas-y, c’est ton tour’. Cela m’a galvanisée. Éric a renoncé à beaucoup de choses ces derniers mois et je sais que revenir ici suscite autant de joie que d’amertume en lui, tant il aime le sport. Je suis toujours sous le choc. Les parcours étaient brillants et, en tant que cavaliers, nous avons énormément appris. Merci aussi à Rolex d’avoir soutenu ce concours ; nous en sommes très reconnaissants”, a déclaré l’heureuse lauréate en conférence de presse. “Éric est venu me voir en novembre, pour me demander si j’étais partante pour monter ses chevaux. Bien-sûr, je l’étais. J’ai changé mon système de travail, de façon à pouvoir travailler librement avec lui. Cela faisait longtemps que je n’avais plus monté à ce niveau. Je n’étais pas certaine d’en être encore capable, mais Éric y croit toujours à 100%. Quand il décide que quelque chose va se passer, on ne peut que le suivre. Chaque jour à ses côtés est une vraie leçon. Cela fait des années que nous nous entraidons et je suis simplement heureuse de pouvoir écrire ce dernier chapitre de ma carrière avec lui. Le plan pour l’équipe est d’aller à Rome, dans deux semaines. Ensuite, je retournerai au Canada, à Spruce Meadows, avec les chevaux d’Éric, avant de revenir en Europe. J’ai toujours mes écuries au Canada et j’alterne entre le Canada et la Belgique. Mon intention est de me maintenir et de faire tout le nécessaire pour rester au top et continuer de progresser ; l’endroit où il faut être est évidemment l’Europe.”

Dieu Merci lors du premier tour.

Deuxième, Yuri Mansur a livré une véritable leçon à tout le monde. Avec son fidèle Vitiki, à qui il voue une passion sans borne, le Brésilien a pris une belle revanche sur la vie. Depuis quatre ans, l’attachant alezan enchaîne les blessures. D’abord grièvement blessé à Aix-la-Chapelle en 2018, ce véritable battant s’est remis de sa fracture, déjouant tous les pronostics. “Il a fait ça avec trois jambes, imagine avec quatre !”, plaisantera même l’Auriverde au paddock, en serrant la main de Grégory Wathelet. En fin d’année dernière, Vitiki a dû subir une nouvelle opération, visant à retirer un imposant kyste qui lui bloquait la respiration du côté gauche. Cette force de la nature s’en est à nouveau remis, pour la plus grande joie de son pilote, qui l’a enlacé tendrement en sortie de piste. “Monter Vitiki est toujours émouvant pour moi. À chaque parcours, il me procure une émotion différente. Il avait disputé son premier 5*, ici, à la Baule, sans aucune expérience, lorsque nous avions remporté la Coupe des nations, a souligné le Brésilien. “J’étais le premier des sans-faute à revenir en piste aujourd’hui. Comme personne avant moi n’avait signé un parcours parfait, j’ai essayé d’aller aussi vite que possible, sans prendre trop de risques. Je suis très content et je crois que je ne pouvais pas suivre un meilleur plan aujourd’hui, comme tenu du scénario.”

L'immense bonheur de Yuri Mansur en sortie de piste.

Vitiki au barrage.

Le podium de ce Grand Prix à 1,60m, disputé en deux manches et richement doté - Beth Underhill a empoché la coquette somme de 165.000€ -, a été complété, non pas par un, mais par deux cavaliers ! En effet, Grégory Wathelet, auteur d’une faute en première manche avec Nevados S et dernier repêché pour la seconde manche, a produit un superbe barrage, terminant en 41”66. Ayant mis la pression sur ses poursuivants, le Belge, vainqueur de la Coupe des nations vendredi, est remonté progressivement dans le classement, pour terminer sur la troisième marche du podium… accompagné par Pierre Marie Friant ! Le local de l’étape a, lui aussi, enregistré un chronomètre de 41”66. Cela aurait pu lui valoir la victoire, mais une erreur, concédée sur l’excellent Urdy d’Astrée, l’a obligé à laisser filer le flot du vainqueur.

Le podium du Grand Prix.

Grégory Wathelet et son sublime Nevados.

“C’est magique”, s’est malgré tout réjoui le Tricolore en conférence de presse. “Je suis content car mon cheval a eu des petits soucis de santé ces dernières saisons. J’ai pris le temps de le remettre dans le bain progressivement, d’abord sur des épreuves du Grand National, puis aux championnats de France. Il a retrouvé une grande forme. J’ai eu la chance de venir ici, et mon cheval a répondu présent ; je n’ai pas grand-chose à lui reprocher. Il se donne à fond et je suis ravi. Mes quatre points au barrage sont sans doute ma faute, et, si c’était à refaire, je prendrais peut-être un peu moins de risques. Mais peu importe, c’est le jeu !”

Pierre Marie Friant et Urdy d'Astrée.

Aux cinq et sixièmes rangs, la Suisse signe un joli doublé grâce à Steve Guerdat et son Vénard de Cerisy, et au jeune, mais diablement talentueux, Edouard Schmitz, juché sur Quno. Suivent Simon Delestre et son bondissant Cayman Jolly Jumper, ainsi qu’Harrie Smolders, qui avait fait du rendez-vous baulois un objectif pour son Bingo du Parc. Il convient également de souligner les beaux parcours de Martin Fuchs, sans-faute en premier manche avec l'exceptionnel Conner Jei, Gerrit Nieberg, presque impeccable sur Ben 431 et battu sur la palanque placée en avant-dernière difficulté, la belle impression laissée dans l’acte initial par Nicolas Delmotte et Dallas Vegas Batilly, un peu émoussée en seconde manche, ou encore Aurélien Leroy, certes dernier du classement avec un score lourd, mais dont le sublime Croqsel de Blaignac n’a pas touché la moindre barre pour sa première apparition à ce niveau.

Croqsel de Blaignac et Aurélien Leroy.

Martin Fuchs et l'impressionnant Conner Jei.

Rendez-vous en 2023, donc, mais un peu plus tard dans l’année, puisque l’Officiel de France sera décalé au mois de juin, à la demande des cavaliers.

Les résultats complets et les vidéos ici.

Crédit photo : ©  Mélina Massias. Photo à la Une : Beth Underhill et le magnifique Dieu Merci van T&L.