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“Je voyais l’échéance de Paris 2024 de très loin il y a encore quelques mois”, Olivier Perreau (2/3)

Olivier Perreau
Reportages vendredi 20 octobre 2023 Mélina Massias

Huitième des derniers championnats d’Europe de Milan avec sa fantastique GL Events*Dorai d'Aiguilly, Olivier Perreau vit l'une des plus belles périodes de sa carrière sportive. Discret, calme et travailleur, le natif de Saulieu a mis au point, au fil des années, un système bien rodé. De l’élevage à la formation en passant par la performance à haut niveau, le Tricolore maîtrise chaque maillon de la chaîne. Un avantage non négligeable dans sa quête, toujours raisonnée, des sommets. Passionné par les jeunes chevaux, qu’il observe tantôt dans l’un de ses vastes prés, tantôt sur leurs premiers parcours en compétition, le père de famille cache encore bien des cartes entre Vougy et Iguerande, où sont établis son écurie et son élevage, au bord de la Loire. En septembre, l’actuel soixante-troisième meilleur cavalier du monde a ouvert les portes de son havre de paix à Studforlife et livré quelques-uns de ses secrets. Rencontre en trois épisodes.

La première partie de ce reportage est à (re)lire ici.

Aux championnats d’Europe de Milan, GL Events*Dorai d'Aiguilly, dix ans, est définitivement entrée dans la cour des grands, après une saison 2023 réussie en tout point. “Je suis très content de notre résultat à Milan. Faire partie des cinq cavaliers retenus pour représenter la France était déjà une satisfaction pour moi”, rappelle son cavalier et éleveur, Olivier Perreau. “Cette échéance était l’objectif de l’année. J’ai toujours senti du potentiel en Dorai. L’an passé, à neuf ans, elle s’est aguerrie sur des Coupes des nations 3 et 4*, dans le but de pouvoir passer au niveau supérieur cette année. Nous avons démarré assez tôt à Saint-Gall, où elle a réalisé un bon concours. Ensuite, tous les CSIO se sont succédé, avec des résultats corrects tout au long de la saison qui nous ont permis d’obtenir cette sélection.” Douzième de l’étape de la Coupe du monde Longines de Bordeaux en février, auteure de deux parcours à quatre points dans deux Grands Prix 4* à Vejer de la Frontera en suivant, huitième de l’épreuve reine du CSI 4* de Fontainebleau - mis sur pied par l'excellente équipe de GL Events -, Dorai n’a rien raté des grands événements suivants. Une faute à Windsor, un parcours à quatre points puis un clear round dans la Coupe de Saint-Gall, un parcours magistral dans la première manche du Grand Prix du mythique CHIO 5* d’Aix-la-Chapelle, un sans-faute et un quatre points dans la Coupe de Hickstead, puis deux parcours à une faute à Dublin avant de s’envoler pour l’Italie. “Pouvoir sauter à Milan a aussi été une satisfaction, car c’était la première année où le cinquième d’équipe avait cette chance. C’est arrivé au bon moment !”, glisse le Français. Et effectivement, cette nouvelle règle ne pouvait guère mieux tomber. 

Olivier Perreau et GL Events*Dorai d'Aiguilly en route pour la seconde inspection vétérinaire à Milan. © Mélina Massias

“Dorai a très, très bien sauté tous les jours. C’était super”, reprend Olivier, qui n’avait pas envie de jouer les figurants au centre de l’hippodrome San Siro. “Bien sûr, nous avons pris de l’expérience. Il s’agissait de mon premier grand championnat Senior et du premier de Dorai également. Toutefois, si on va à un championnat seulement pour prendre de l’expérience, ce n’est pas la peine de faire le déplacement. J’avais envie de faire des sans-faute et je savais que ma jument en était capable. Elle l’a d’ailleurs prouvé. De fait, je n’ai pas été surpris qu’elle puisse enchaîner les bons parcours. Elle l’a fait toute l’année. L’épreuve que j’appréhendais le plus était la Chasse et son Barème C. Je ne savais pas trop quelle tournure allait prendre l’épreuve. J’ai essayé de ne pas exagérer et de faire ce que nous étions capables de faire à ce moment précis. J’ai eu un peu de chance car le parcours s’est révélé très délicat et a engendré beaucoup de fautes. Cela m’a donc bien placé et mis en confiance. Ensuite, tout s’est bien enchaîné.” Jusqu’à obtenir une très belle huitième place, la deuxième meilleure performance pour les Bleus, derrière Julien Epaillard, en bronze avec Dubaï du Cèdre, une autre jument de dix ans made in France. 

La fille de Kannan a fait montre de tous ses moyens en Italie. © Mélina Massias



Prendre le temps

De marbre face à la pression de l’enjeu, précis et déterminé, Olivier a marqué de précieux points en vue d'un autre championnat, rêve de tout sportif : les Jeux olympiques, qui plus est dans son pays. “Pour être franc, je voyais cette échéance de très loin il y a encore quelques mois. Nous croyons très fort en Dorai depuis qu’elle a sept ans, mais de là à penser qu’elle serait une jument pour un tel rendez-vous… En avançant petit à petit, à son rythme, elle a confirmé. Je suis déjà heureux d’avoir pu participer aux championnats d’Europe de Milan. C’était une étape presque impérative pour moi. Désormais, je pense que ma jument a montré qu’elle avait le potentiel pour ce genre d’événement. Toutefois, avec les chevaux, il faut rester calme. Il y a des hauts, des bas. Chevaux comme cavaliers peuvent connaître une méforme”, tempère l’intéressé. “Désormais, je vais construire un programme à long terme, avec Paris en ligne de mire, mais sans nous mettre de pression. Je vais d’abord penser à ma jument. Elle ne prendra part qu’à des concours sélectionnés avec minutie. On ne va pas courir des Grands Prix juste pour courir des Grands Prix. Dorai va profiter d’un peu de repos, puis nous verrons au fur et à mesure ce qui est le mieux pour elle.”

Dans les mois à venir, GL Events*Dorai d'Aiguilly va suivre un programme sur mesure. © Sportfot

Si les Jeux de Paris, dont le coup d’envoi sera donné dans moins de trois cents jours, se rapprochent à grands pas d’Olivier et sa jument de tête, pas question pour le Tricolore de changer sa philosophie. “Ce que j’aime, c’est prendre le temps avec les chevaux, toujours rester calme. Je trouve que c’est de cette manière que l’on avance. À vouloir aller trop vite ou trop en faire, on se brûle les ailes. J’essaye de m’adapter à chaque cheval, dès ses quatre ans. Certains chevaux ont besoin de deux mois de travail, là où d’autres nécessiteront peut-être cinq ou huit mois d’apprentissage. Selon moi, il faut savoir adapter le travail à chaque individu. Chaque cavalier a bien sûr sa méthode, mais il me semble primordial de pouvoir l’adapter à chaque cheval”, plaide celui qui a légitimement glané le titre de révélation de l’été et de l'année, au moins pour le clan français. 

Olivier Perreau ne tarit pas d'éloge au sujet de sa deuxième star, après GL Events*Venizia d'Aiguilly, évidemment. © Mélina Massias

Iguerande, le paradis des poulains

Quinze minutes, treize kilomètres et un département séparent Vougy d’Iguerande, où grandissent paisiblement les futures stars de l’affixe d’Aiguilly. Sur la route, Olivier ne peut s’empêcher de jeter un bref coup d'œil à quelques prés où se trouvent d’autres de ses protégés. Un groupe de quatre ans lui tient particulièrement à cœur. Il en est convaincu, parmi eux se cachent d’excellents éléments, que seul le temps et la patience permettront de révéler au grand jour. 

À Iguerande, les prés s'étendent à perte de vue. © Mélina MassiasLui a encore quelques années devant lui avant de laisser présager son potentiel. Avec son nom évocateur, No Limit d’Aiguilly est prédestiné à incarner la relève de son éleveur d'ici une dizaine d’années. Curieux et pas farouche pour un sou, il a l'insouciance de ne pas avoir conscience de ses origines. Sa mère, Jalousie d’Aiguilly (Cristallo 7), est une fille de Dorai d’Aiguilly. Son père est l’illustre Diamant de Semilly. Rien que ça. Cet attachant petit poulain grandit pourtant comme tous les autres, dans de grands espaces verts et leur stabulation attenante, entre ses congénères et des vaches Aubrac, idéales pour maximiser le potentiel prairial des champs de la propriété. Et les belles blondes seront bientôt rejointes par des Angus, une race écossaise reconnaissable à sa robe ébène.

No Limit d'Aiguilly et sa mère, Jalousie d'Aiguilly, prennent la pose. © Mélina Massias

Les vaches Aubrac broutent en harmonie à côté des chevaux de l'élevage. © Mélina Massias



Comme GL Events*Venizia d’Aiguilly et bien d’autres très bons chevaux, GL Events*Dorai d’Aiguilly, la grand-mère du tout jeune No Limit, né le 10 juillet dernier, a vu le jour chez Olivier. Un avantage certain pour performer à haut niveau, sachant que son naisseur a été son cavalier exclusif en compétition, de ses quatre à ses dix ans. “Je connais Dorai par cœur”, avoue-t-il. “Je sais exactement ce que sautent mes jeunes chevaux, dès leur plus jeune âge. Je pense que chaque cheval a un compteur ; pouvoir garder un œil dessus tout au long de leur carrière est important. Mon but n’est pas de faire des mes chevaux des champions à trois, quatre ou cinq ans ; mon but est d’essayer de les amener à s’exprimer au mieux sur le long terme. Nous savons que les chevaux peuvent sauter jusqu’à seize, dix-sept ans sans souci. Lorsqu’on en a un bon, il me semble préférable de tout faire pour que ses belles années sportives se déroulent entre ses neuf et seize ans plutôt qu’avant.”

Mary Lou d'Aiguilly, une fille de Mylord Carthago et Bijou Orai, vient saluer son naisseur. © Mélina Massias

Comme son petit-fils, Dorai jouit d’un solide papier. Son père, Kannan, n’est plus à présenter. “Pourquoi avoir choisi Kannan ? Parce qu’il me semblait aller assez bien avec la mère de Dorai”, développe l’éleveur. “C’est vrai que le cheval était très à la mode. À l’élevage, j’aime utiliser des étalons que l’on peut qualifier de valeur sûre. Je crois que Kannan a plutôt prouvé que sa descendance était correcte ! (rires)” Et sa mère, Bijou Orai, n'est pas en reste.

Avant de se concentrer sur son rôle de génitrice, Bijou Orai a fait le bonheur de ses cavaliers en compétition, dont Olivier Perreau. © Sportfot

Bijou Orai est sans doute l’une des meilleures mères du moment. Si quelques grandes souches devenues internationales lui font peut-être un peu d’ombre, la fille de Toulon et petit-fille de Calypso III est tout de même la mère de deux chevaux de très haut niveau - Dorai et le très prisé Eldorado vd Zeshoek -, sans avoir eu des centaines de produits, tandis qu’elle est la sœur de deux compétitrices ayant évolué jusqu’à 1,60m. “Bijou Orai a été acquise par la famille Goutal, avec qui j’ai travaillé pendant de longues années”, précise Olivier. Après le sevrage de son premier poulain, le fameux Eldorado, la belle a réalisé une honorable carrière sportive, d’abord avec Wilm Vermeir et Simon Delestre, puis aux côtés d’Olivier Perreau. Pleine d’énergie et extrêmement respectueuse, la BWP, prunelle de l’élevage de Gerry Martens, s’est ensuite consacrée avec réussite à la reproduction. Sa première descendante à avoir porté l’affixe d’Aiguilly n’est autre que Dorai, née par transfert d’embryon. “Elle n’était pas un top-modèle pouliche, mais a toujours été une jument agréable. Parfois un peu brut en raison de sa force débordante, mais très sensible, très respectueuse de l’homme, des obstacles, attentive et dotée de beaucoup d’énergie. Dorai est un peu atypique dans son physique, parce qu’elle est un peu longue, mais elle a toujours montré du potentiel. Il a simplement fallu lui donner énormément de temps. Dans la vie de tous les jours, elle est très calme, très sûre d’elle. Je la trouve vraiment intelligente. Elle sait lorsqu’il faut se reposer et lorsqu’il faut se donner en piste. Elle comprend vite les choses et assimile bien les exercices qu’on lui présente”, loue son cavalier. 

Avec GL Events*Dorai d'Aiguilly, Olivier Perreau peut légitimement nourrir de grandes ambitions. © Mélina Massias

Photo à la Une : Olivier Perreau et GL Events*Dorai d’Aiguilly dans leur bulle à Milan. © Mélina Massias

L'ultime partie de ce reportage est disponible ici.

Retrouvez Olivier Perreau dans un numéro exclusif de Riders Club, présenté par Kamel Boudra.