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“Je n’aurais jamais pris part à sept championnats d’Europe si j’avais monté pour l’Allemagne ou la Suisse”, Andreas Schou (2/2)

Sport jeudi 10 novembre 2022 Mélina Massias

Lorsqu’il a commencé à pratiquer l’équitation, dans le poney-club du coin, Andreas Schou s’est d’abord tourné vers le pony games. Cette discipline, le Danois l’a pratiquée quelques années, en équipe avec d’autres garçons de son âge. Et puis, le saut d’obstacles s’est imposé à lui, un peu comme une évidence. Talentueux, discret et réfléchi, le jeune trentenaire et père de famille s’est offert un nouveau statut cette année en gravissant, marche après marche, les rangs du classement mondial. En figurant en trente-troisième position de cette hiérarchie en novembre, il a d’ailleurs enregistré son meilleur résultat en date. De quoi le motiver à poursuivre dans cette voie, après avoir longtemps mis l’accent sur le commerce. Grâce à ses deux cracks de onze ans, Independent et Darc de Lux, deux grandes et puissantes montures comme il les affectionnent, et au fort prometteur et bien nommé Unbelievable, Andreas Schou a les prochaines grandes échéances en ligne de mire. Son expérience, acquise lors de neuf échéances majeures en Séniors, avec comme point d’orgue une neuvième place aux Européens d’Aix-la-Chapelle en 2015, sera un atout précieux dans la perspective de Milan, puis de Paris. Rencontré à Equita Lyon, quelques minutes avant le Grand Prix Longines du vendredi, le sympathique pilote a évoqué son parcours, sa formidable saison, ses inspirations ou encore son amour pour son pays, et ce, du saut d’obstacles au cyclisme. Rencontre en deux épisodes.

La première partie de cet article est à (re)lire ici.

Depuis ses débuts en pony games, le statut d’Andreas Schou a bien évolué. “Je pense que mon plus grand atout est le fait que j’ai pu créer une routine et emmagasiner de l’expérience depuis mes années Juniors, Jeunes cavaliers et en affrontant les circuits majeurs. En représentant le Danemark, on a la chance d’aller en championnat. J’ai pris part à sept Européens, j’ai été aux Mondiaux et aux Jeux olympiques. Je n’aurais jamais fait tout cela si j’avais monté pour l’Allemagne ou la Suisse. Peut-être que j’aurais obtenu une, voire deux sélections”, savoure le Scandinave, confiant que d’autres de ses compatriotes puissent bientôt l’entourer au cœur d’une solide escouade danoise. “Notre équipe devient absolument de plus en plus forte. Nous avons de très bons jeunes qui gravissent les échelons. Le fait d’avoir un Danois bien placé au classement mondial pousse un peu tout le monde. Avant, nous étions tous loin dans cette hiérarchie. Maintenant, nous avons une forme de motivation pour les nouveaux visages de notre délégation. Nous bénéficions également d’une place pour la Coupe du monde et notre chef d’équipe (Bo K. Møller, ndlr) est doué pour faire émerger les jeunes en Coupes des nations. Je pense que plein de facteurs jouent en notre faveur”, note-t-il. De là à voir un jour le Danemark rivaliser avec la Suède, le Royaume-Uni, les Pays-Bas ou la Suisse ? “Je crois que nous avons les cavaliers pour”, répond Andreas. “La question qui se pose est de savoir si nous pourrons trouver les propriétaires pour conserver nos bons chevaux. C’est toujours notre interrogation. Ce serait merveilleux. Nous n’avons peut-être pas Henrik von Eckermann ou Peder Fredricson, mais nous avons des cavaliers suffisamment talentueux, qui n’ont malheureusement pas de chevaux. Lindea Ericson, Tina Lund, etc ; il y a plein de super pilotes. Avec les bonnes montures, cela serait différent. J’espère qu’un jour tout se mettra en place et que nous n’aurons pas seulement un ou deux bons chevaux, mais que, comme la Suède, nous aurons quatre solides cavaliers avec les complices adéquats. C’est cela qui fait la différence.”

Le sublime Darc de Lux lors de la warm-up de Herning cet été. © Sportfot

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Et pour se hisser encore plus proche du sommet, le Danemark a de sacrés exemples desquels s’inspirer. “J’adore la façon de travailler de l’équipe Suisse”, confesse Andreas. “Ce sont naturellement des gens de chevaux, qui savent garder les pieds sur terre. Leurs chevaux adorent sauter et donnent tout pour eux. En tant que collectif, les Helvètes sont toujours très unis. Je trouve cela très spécial. Ensuite, une fois cela dit, je trouve la capacité d’adaptation de Christian Ahlmann remarquable. Malgré sa taille, il peut monter des petits comme des grands chevaux. C’est incroyable de voir cela.”

Unbelievable, le grand espoir du Danois. © Sportfot

“Mon temps libre est consacré à mes enfants”, Andreas Schou

Derrière le cavalier Andreas Schou, se cache l’homme, mais surtout le père de famille. “Mon temps libre est consacré à mes enfants. Ils ont sept et neuf ans. Ils veulent souvent aller au football, à la danse ou même monter à cheval. Ils sont bien occupés à la maison ! Je suis loin presque tous les week-ends, alors, j’essaye de profiter des après-midis avec eux. Et si j’avais plus de temps, j'adorerais aussi jouer davantage au golf ou au paddle”, glisse l’intéressé. Et de reprendre : “Je pense que mon point faible, par rapport à d’autres cavaliers du top 10, qui se concentrent à 120% sur leurs chevaux, est que je pense parfois à d’autres choses. Peut-être que je prends trop de vacances, de temps en temps, avec ma famille et mes enfants. Si je voulais faire partie des dix meilleurs mondiaux, je devrais peut-être plutôt m’entraîner. Mais il faut trouver le juste équilibre.” Et le Danois semble avoir trouvé le sien.

Independent et Andreas Schou en sortie de piste. © Mélina Massias

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La famille est également un maillon central de l’organisation du système d’Andreas. En plus de son épouse, qui a brillamment lancé les carrières respectives des stars que sont (en train de devenir) Independent et Darc de Lux, le trentenaire peut compter sur le précieux soutien de son cadet, Christian, qui lui prodigue également ses conseils sous la casquette d’entraîneur. “Nous gérons notre propre écurie, au Danemark, avec mon petit frère. Il a beaucoup monté par le passé, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il se concentre sur le commerce et la vente de camions pour chevaux, en plus de tout gérer à la maison. Nous avons cent-trente chevaux, donc il y a fort à faire, à tout point de vue ! Il m’aide beaucoup à avoir le temps de me concentrer sur le sport et de profiter d’une vraie vie de famille”, complète-t-il.

Le styliste Independent est monté en puissance cette saison au plus haut niveau. © Mélina Massias

Penser à demain

À Sommersted, petite bourgade sise à cent-vingt kilomètres au sud d’Herning, Andreas, son frère, son épouse et son équipe gèrent l’écurie Absolute Horses. Avant de se concentrer sur le sport et le commerce, la structure a tenté sa chance à l’élevage, notamment en tant que station de monte, mais le marché local n’était pas suffisamment conséquent. “La valeur des chevaux était trop importante et ils ne saillissaient pas suffisamment”, explique-t-il. “Nous avons arrêté cette activité. Ensuite, nous avons essayé de faire un peu d’élevage avec nos anciens bons chevaux de concours. Cependant, je dois dire que les poulains que nous avons fait naître ne sont pas devenus assez doués pour le niveau que nous visons (rires). Nous avons également mis fin à cela. Désormais, nous nous concentrons sur l’achat de bons chevaux de quatre, cinq et six ans, que nous formons nous-même. Nous avons débuté cette activité il y a un paquet d'années. Les résultats commencent à se faire sentir, puisque les chevaux que nous avons à haut niveau sont ceux que nous avons éduqués nous-même. C’est génial.” Et en matière de qualité, le Danois sait ce qu’il veut. “J’aime la notion de moyens. Je sais que pour certaines personnes, c’est un peu vieux-jeu, mais, si les chevaux peuvent sauter de gros obstacles, on peut travailler autour de cela. Bien sûr, pour évoluer dans le sport de haut niveau, ils doivent aussi être rapides, intelligents et respectueux, mais ils peuvent apprendre la plupart de ces choses. Lorsque les chevaux ont suffisamment de moyens, s’ils ne correspondent pas aux attentes des professionnels, il est aussi plus simple de leur trouver une nouvelle maison, puisqu’ils peuvent aider un cavalier à prendre de l’expérience sur de beaux parcours. De toute façon, je crois qu’il est difficile de tout avoir dans un seul et même cheval. On ne peut pas avoir l’ensemble complet. Il y a certaines choses sur lesquelles on doit faire travailler et évoluer nos montures. Et puis, on doit aussi croiser les doigts pour que tout aille dans notre sens”, souligne Andreas.

Le génial Darc de Lux, repéré par son cavalier à cinq ans. © Mélina Massias

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En plus de son activité équestre, le trentenaire se dit concerné par la cause environnementale. Un sujet majeur au Danemark, puisque le pays a l’ambition de se passer des énergies non-renouvelables d’ici à 2050. “Nous avons beaucoup de terrain à la maison. Nous parlions des bonnes actions à mener et nous avons décidé de planter des arbres, qui nous offrent une belle forêt. À la maison, nous trions également les déchets avec beaucoup d’attention. Ma femme serait furieuse si je jetais les restes de nourritures avec le plastique ! Je crois que tout le Danemark est très impliqué sur le sujet”, révèle Andreas. Quid, alors, de l’impact des activités équestres, qui impliquent de nombreux déplacements à travers la planète, et les émissions carbones qui vont avec ? Est-il possible d’améliorer ce bilan ? “Oui et non”, estime le cavalier. “Je pense qu’il faut que nous exportions notre sport dans d’autres pays. La majeure partie de l’élevage est en Europe, mais l’industrie est énorme. Si nous n’allons pas aux Etats-Unis, ou au Canada, que nous ne laissons pas notre discipline grandir, il y aura un manque dans nos entreprises. Pour que le sport progresse au Moyen-Orient ou ailleurs dans le monde, les gens ont besoin de voir les meilleurs cavaliers et chevaux du monde en action afin d’être motivés. C’est une problématique difficile…”

Independent à l'Husbide Jumping de Grimaud lors d'un Grand Prix. © Sportfot

Omaha, Milan et Paris ?

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Motivé, talentueux et visiblement au cœur d’un système bien rodé, Andreas a toutes les cartes en main pour l’avenir. Après un début prometteur sur le circuit de la Coupe du monde et en indoor, fera-t-il de la finale d’Omaha un objectif ? “Independent n’avait jamais sauté en intérieur avant Oslo. Darc avait, lui, disputé deux concours dans cette configuration à huit ans. Ce sont deux grands chevaux. J’ai fait le choix d’aller à Oslo, puis à Lyon, et à Stuttgart. Après cette étape, je verrai si j’ai quelques points. Si j’ai un bon sentiment, je continuerai, sinon, j’élaborerai un autre plan à partir de là”, se projette l’intéressé. Sur le CV du Danois, il ne manque qu’une participation à la finale du plus mythique des circuits hivernaux, ou presque. Peut-être que cette anomalie sera corrigée dès le printemps prochain, dans le Nebraska. Si Oslo et Lyon se sont soldés par de très bons parcours, Stuttgart devrait livrer plus d’informations sur la suite que donnera le trentenaire à sa saison hivernale, et ce dès ce week-end. Une chose est sûre, les prochains mois mèneront vers l’objectif ultime de bon nombre de sportifs : Paris 2024. D’abord, il y aura les Européens de Milan, où Andreas Schou pourrait honorer une dixième grande sélection en Séniors, et, pourquoi pas, décrocher sa première breloque, après être passé tout près du but à Aix-la-Chapelle, en 2015.

Andreas Schou à Lyon. © Mélina Massias

Photo à la Une : Andreas Schou et Darc de Lux, en fin de parcours à l’Hubside de Grimaud. © Sportfot