“Henrik von Eckermann a prouvé qu’il formait le meilleur couple du monde avec King Edward”, Ludo Philippaerts

Tout au long des championnats du monde de jumping, le Belge Ludo Philippaerts, qui compte à son palmarès quatre participations aux Jeux olympiques, trois aux Jeux équestres mondiaux, onze aux championnats d’Europe et treize en finale de la Coupe du monde, livrera ses analyses après chaque épreuve. Deux jours après le sacre tant attendu d’Henrik von Eckermann, le patriarche de la famille Philippaerts revient sur la domination du Suédois et son crack King Edward, mais aussi sur les faits marquants de la fin de cette échéance mondiale. 

Grand favori, Henrik von Eckermann a été médaillé d’or, dimanche 14 août, à Herning, au Danemark, devant Jérôme Guéry et Maikel van der Vleuten. Qu’avez-vous pensé du dénouement de ces championnats du monde ?

Je pense que les meilleurs sont aux avant-postes. Henrik von Eckermann était le favori au titre, et ce avant même le début de la compétition. Il a prouvé qu’il formait le meilleur couple du monde avec son cheval (King Edward, ndlr) en ce moment. C’était vraiment génial pour lui. Jérôme a également été remarquable avec Quel Homme de Hus. Et Maikel van der Vleuten a montré de très bonnes choses aussi ; son cheval (Beauville Z, ndlr) a vraiment bien sauté. Dimanche, le jour de la finale, les vingt et un chevaux et cavaliers au départ de la première manche étaient d’un niveau incroyable. Quand on voit les parcours proposés sur place, et la facilité avec laquelle chevaux et cavaliers les sautent, c’est stupéfiant. La différence avec ce que nous pouvions voir il y a dix ou quinze ans est énorme. Le niveau est tellement élevé ! Il faut vraiment des chevaux exceptionnels pour remporter une médaille lors d’un tel championnat.

La joie de Jérôme Guéry et Quel Homme de Hus après un nouveau sans-faute. 

Pour beaucoup, King Edward est le meilleur cheval du moment. Il l’a encore prouvé cette semaine. Qu’est-ce qui le rend si spécial et performant ?

King Edward est enregistré au BWP. Il est né ici, en Belgique, et nous avons eu l’occasion de le voir régulièrement. Hier (lundi 15 août, ndlr), par hasard, j’ai encore vu une vidéo de lui à six ans. Il avait bien sûr de la qualité, mais personne n’aurait pensé qu’il pourrait sauter les obstacles qu’il affronte aujourd’hui. Il a trouvé son cavalier et tous les deux forment un excellent couple. Je peux comparer cela avec la jument de mon fils (Nicola Philippaerts, ndlr), Katanga v/h Dingeshof. Elle est aussi très particulière. Lorsqu’on la voit évoluer sur un parcours à 1,30m, on ne pense pas qu’elle est capable de sauter un parcours à 1,60m. Elle a aussi sauté de façon magnifique à Herning. Terminer huitième des championnats du monde est une très belle performance. Nicola a joué de malchance en commettant deux fois une faute sur le dernier obstacle du parcours. Sans cela, il aurait peut-être été sur le podium. Il n’était vraiment pas loin. Il faut que les couples trouvent une certaine alchimie pour performer à ce niveau. Pour Beauville et Maikel, c’est la même chose. Nous avons vu Quel Homme très bien sauter avec Gaëtan (Decroix, l’un de ses propriétaires, ndlr), mais le duo qu’il forme avec Jérôme est vraiment de grande qualité.

Henrik von Eckermann en pleine célébration sur le podium des championnats du monde. 

“Ioli Mytilineou a fait un championnat fantastique”

Rien n’était joué dans cette finale, et plusieurs cavaliers bien positionnés ont perdu une médaille potentielle en raison de fautes. C’est notamment le cas de Jens Fredricson, qui a concédé douze points avec Markan Cosmopolit. Comment peut-on expliquer ce score ?

Ce sont des choses qui arrivent toujours. Le cheval de Jens m’a semblé un peu émoussé à la fin du deuxième tour, sans doute ressentait-il la fatigue des épreuves précédentes. Il y avait un tour de trop pour lui. Mais il a tellement donné les autres jours ! Jusqu’à la finale individuelle, il a fait un championnat incroyable, presque parfait.

Il y a aussi eu plusieurs forfaits, dont la majorité étaient liés à une décision des cavaliers. N’est-ce pas regrettable de ne pas avoir vu certains couples batailler pour remonter dans le top 10 ?

Quelques cavaliers ont peut-être senti que leurs chevaux n’étaient pas en super forme. Ils se sont donc dit qu’ils n’avaient plus de chance d’intégrer le top 5 ou 10 et que cela n’avait pas d’intérêt de poursuivre la compétition. Cela ne sert à rien de casser les chevaux. Le bien-être des chevaux est important. Lorsque l’on connaît son cheval et que l’on trouve qu’il a déjà assez sauté, qu’il n’est plus en mesure de fournir autant d’efforts, il est peut-être préférable de ne pas prendre le départ d’une épreuve supplémentaire.

D’autres performances vous ont-elles marqué cette semaine ?

Oui, et je pense notamment à la Grecque Ioli Mytilineou. Elle a fait un championnat fantastique. Elle n’a fait presque que des parcours sans-faute (à l’exception de la première manche de la Coupe des nations, conclue avec huit points, ndlr) et son cheval (L’Artiste de Toxandra, ndlr) a super bien sauté. Elle a terminé juste en dehors des douze couples repris pour la deuxième manche de la finale (à la dix-neuvième place, ndlr), mais elle a réalisé un excellent championnat. Elle est très jeune et n’a pas beaucoup d’expérience, mais a montré de très bonnes choses. Elle montait un autre cheval [que celui qu’elle avait aux championnats d’Europe de Riesenbeck] (Levis de Muze, ndlr). Elle a de bons chevaux et a fait beaucoup de progrès. Elle a définitivement prouvé qu’elle est prête pour performer en championnat.

Ioli Mytilineou et son génial fils de Toulon.

“Louis Konickx a construit un très bon championnat”

Tout au long de la semaine, Louis Konickx, le chef de piste, a proposé d’excellents parcours. Qu’avez-vous pensé de ces deux derniers tracés, support de la finale individuelle ?

Il a, en effet, construit un très, très bon championnat, avec des parcours particulièrement intéressants. J’ai trouvé le deuxième parcours de la Coupe des nations extrêmement relevé. Si je peux émettre une petite critique sur un point, je pense que ce parcours-là aurait peut-être dû être le premier tour de la finale individuelle. Ainsi, en utilisant ce tracé dimanche, nous aurions peut-être eu quelques fautes supplémentaires (quatorze des vingt et un couples au départ sont sortis indemnes de la première manche, ndlr). L’acte initial de la finale était peut-être un poil trop facile pour de nombreux couples. Pour le reste, je n’ai rien à dire. Je ne veux pas jeter la pierre au chef de piste ; bien au contraire. Il a fait un excellent travail.

Un mot sur l’organisation de ces Mondiaux et les infrastructures mises à dispositions des athlètes ?

J’ai trouvé que ce championnat avait été très, très bien organisé. Le stade était super, le terrain était très bien, tout comme le matériel, les boxes, et les parcours proposés par le chef de piste. Le seul petit hic, qui n’est qu’un détail, réside dans le fait que les hôtels sont un peu loin du site.

Enfin, un dernier commentaire concernant l’ambiance. Dimanche, les supporters suédois étaient encore déchaînés dans les tribunes !

Oui, c’était super ! Le fait que la compétition soit organisée dans un pays scandinave a été un plus pour l’ambiance. Il y avait beaucoup de Suédois, venus soutenir leur équipe et leurs représentants. Que ce soit lors de la deuxième manche de la Coupe des nations, vendredi, ou dimanche, pour la finale individuelle, les supporters suédois étaient nombreux. L’ambiance était vraiment très chouette.

Les drapeaux suédois ont largement coloré les tribunes du state Stutteri Ask.

Crédit photo : © Scoopdyga. Photo à la Une : Henrik von Eckermann et King Edward en plein vol.