Xavier Marie, l'avenir comme obsession. (6)

Xavier Marie,
l'avenir comme obsession. (6)
SFL : Au départ, lorsque vous avez acheté des chevaux, vous avez toujours conservé l'affixe des éleveurs … puis récemment, on a vu plusieurs chevaux prendre l'affixe «de Hus ».
X.M. : « Le problème ne s'est pas posé au départ puisque l'on s'est dit que le haut niveau devait s'autofinancer par la commercialisation avec l'achat et la vente de chevaux. C'est pour ça que le piquet de Kevin doit être composé de deux chevaux de tête et le reste, ça doit tourner. Ca ne s'est pas passé, tout simplement parce que les premiers achats n'ont pas été à la hauteur des derniers. Du coup, on se retrouve avec un piquet de haut niveau qui coûte une fortune par an, cela coûte 700.000 euros par an pour faire marcher cela sans compter l'amortissement des chevaux et quelle contrepartie pour l'instant ? Une contrepartie d'image, certes, mais qui n'est pas nécessaire pour faire naître des poulains et à les vendre, soyons clair. Donc on travaille vraiment pour l'avenir et pour le sport français. L'avenir car je crois énormément en Kevin et Kevin croit énormément au système que nous avons mis en place. Il faut donc tenir. On n'a pas encore eu le temps de s'en occuper mais on veut partir à la recherche de sponsoring pour alléger la note en apportant à d'autres de la visibilité au travers des chevaux pas simplement « Hus ».
Banda de Hus (Argentinus x Lefevre), grand espoir du haras.
Puis lors d'une discussion, on s'est dit qu'il était dommage de lorsque les chevaux entraient en piste, Hus ne soit que les tapis de selles … etc et que vu le budget, ce serait bien qu'on ait plus de visibilité. Tout est parti comme cela. Cela a fait une polémique que j'ai très bien comprise. Je ne suis pas rentré dedans, j'ai laissé Kevin gérer ça… Le sujet s'est ensuite calmé mais si ça ne s'était pas calmé, je pense que j'aurais donné raison à l'éleveur.
Je pense qu'il faut comprendre que le haras de Hus compte tenu de ses projets et des moyens qui ont été mis en uvre, ce n'est pas à ça près. Je veux dire que ce n'est pas le fait de donner l'affixe « de Hus » en plus ou pas qui va changer la face du monde donc si ça doit nuire à l'image du haras, il ne faut pas le faire … mais je pense que les éleveurs doivent comprendre que ce sera une nécessité dans l'avenir et qui si ce n'est pas « de Hus », ce sera « des petits pois un tel » ou « de la banque du crédit agricole »…
France de Hus (Fergar Mail, à gauche) et Champagne de Hus (Chellano, à droite), deux filles de Banda suitées de Conrad, avec Guillaume Gauthier, responsable de l'élevage au haras de Hus.
Le coût du haut niveau est énorme et si on veut que le haut niveau marche, il va falloir trouver le moyen de faire entrer du financement extérieur, c'est de la visibilité et donc il va falloir lâcher beaucoup de choses y compris le nom et moi, je suis prêt à le faire. Nous n'avons pas encore eu le temps de le faire ici, mais nous allons nous y atteler. Cela a été difficile pour moi de réussir à former une équipe. On n'en parlait tout à l'heure par rapport aux cavaliers mais ce n'est pas que par rapport à eux.
Cela a été une plaie de constituer une équipe car la France n'est pas très professionnalisée en matière de sports équestres par rapport à des pays comme la Hollande, l'Allemagne ou encore la Belgique. De plus, ici, nous sommes loin de la grosse base française qui est la Normandie. Cela a donc été assez compliqué à tous les niveaux de constituer une équipe. Maintenant, au niveau de l'élevage, je suis vraiment content de l'équipe en place, c'est redevenu un plaisir alors qu'à un moment donné, c'était devenu uniquement des choses chiantes.
Les deux poulains de Conrad avec les filles de Banda (mère Chellano à gauche et mère Fergar Mail à droite).
Déjà c'est une activité qu'il faut mettre en place, qu'il faut faire tourner, on a fait de gros investissements … et quand ça ne suit pas au niveau des hommes, on se dit qu'on ne va jamais y arriver. On a besoin de ça, de pouvoir compter sur des gens rassurants, qui font bien leur métier, qui sont impliqués et positifs.
Aujourd'hui, c'est le cas à tous les niveaux des bureaux aux écuries. Les personnes qui se trouvent dans les bureaux ne sont pas issues du milieu du cheval et doivent encore se professionnaliser à ce niveau-là mais elles ont beaucoup de potentiel, font très bien leur travail et sont très impliquées, intelligentes, parlent plusieurs langues, c'est vraiment très plaisant. Maintenant, nous avons donc la base au niveau humain pour aller de l'avant.
Notamment, et ce sera pour nous l'étape suivante, pour aller chercher du sponsoring. Effacer Hus pour trouver des revenus pour co-financer le haut niveau sinon, ce n'est pas possible … sauf s'il y a des étalons qui tournent mais ce n'est pas le cas aujourd'hui et il faudra attendre encore un peu de temps puisque nos premiers étalons susceptibles de passer le cap vers le haut niveau ont 6 & 7 ans, mais c'est dans l'ordre des choses.
SFL : Après avoir délocalisé votre cavalier, vous organisez l'an prochain un concours de foal à Saint Lô. Nantes, c'est vraiment un mauvais choix géographique ? A refaire, construiriez-vous vos installations ailleurs ?
X.M. : « Oui, ce n'est pas le meilleur choix, c'est mon avis (rires) ! Dans un problème purement agricole, Nantes n'est pas une terre d'élevage. Les prairies ici ne sont pas belles, ne sont pas top et sèchent très vite en été, dès le mois de juillet. Nous avons donc contourné ça avec des systèmes d'arrosage… etc mais enfin, là, nous utilisons 20 hectares pour l'élevage et j'aimerais que ce soit beaucoup plus extensif que cela. Nous cherchons aujourd'hui entre 100 et 150 hectares supplémentaires. Donc en effet, je pense que ce n'est pas la meilleure région et peut-être qu'un jour, je délocaliserai l'élevage pour cette raison là car je pense que c'est important. Nous mettons beaucoup de « 1 an » en Bretagne que nous récupérons à 3 ans. Néanmoins, en même temps, j'habite ici et moi, cette activité, c'est honnêtement l'un des plus grands plaisirs de ma vie alors si en plus, elle devait être dissociée de mon lieu de résidence, aujourd'hui ce serait impossible.




