Le grand Kapitol d'Argonne a poussé son dernier souffle

Elevage mardi 19 septembre 2023 Mélina Massias

Né dans la Meuse, chez Sylvie et Pascal Trassart, l’immense Kapitol d’Argonne, plus d’un mètre soixante-quinze au garrot, a connu une vie remplie de succès sur la scène sportive. Propriété d’Emilio Bicocchi, son fidèle cavalier, l’alezan brûlé par Apache d’Adriers sur une toute bonne lignée maternelle avait regagné, il y a onze ans, ses terres natales pour se consacrer à la reproduction. À vingt-cinq ans, l’étalon Selle Français Originel s’est endormi. Sa production, encore jeune et relativement confidentielle, aura désormais la difficile tâche de continuer à écrire son histoire.

Doux géant à la robe alezan brûlée, le Selle Français Originel Kapitol d’Argonne a rejoint les étoiles. Âgé de vingt-cinq ans, l’étalon, star des terrains de saut d’obstacles avec Emilio Bicocchi, son ancien cavalier et fidèle propriétaire, a poussé son dernier souffle, début septembre, dans ses prairies natales. “Au revoir mon grand Kapi, vole au-dessus des nuages comme tu le faisais si bien au-dessus des obstacles”, a sobrement commenté Pascal Trassart, son éleveur, qui avait retrouvé son joyau l’hiver dernier. Encore en forme olympique en décembre, le fils d’Apache d’Adriers et Dame Vannetaise (Galoubet A), dont la souche basse n’est autre que celle d’une certaine Usha van’t Roosakker - entre autres -, avait pris une retraite complète, un peu plus de dix ans après ses adieux aux pistes de compétition, sur ses terres natales.

Kapitol d'Argonne dans un état impeccable, à l'aube de ses vingt-cinq ans, pour son retour sur ses terres natales, en décembre 2022. © Collection privée

Celles et ceux qui ont croisé Kapitol d’Argonne sur un terrain de compétition se souviendront de sa volonté à toute épreuve, de son immense amplitude qui lui permettait de retirer à sa guise des foulées dans les lignes, et de ses moyens hors-norme. Celles et ceux qui l’ont admiré, plus tard, dans ses devoirs de reproducteurs, n’oublieront pas sa présence, son charisme et sa gentillesse. “Un monument de cheval, une gravure puissante faite en chair et en os, je me rappelle avoir pensé à Bucéphale, le cheval d'Alexandre le Grand”, a parfaitement résumé Lisa Katharina Mäder, référente France du stud-book Holstein, qui n’a jamais oublié la première fois où elle a posé les yeux sur cet immense étalon. Du haut de son mètre soixante-seize, Kapitol d’Argonne, formé de ses cinq à sept ans par Paul-Anthony Roché, qui l’avait acquis en 2002, a conquis quelques belles épreuves internationales, dont les Grands Prix 5* de Madrid et 4* d’Arezzo et Munich. Pilier de la Squadra Azzurra, le couple qu’il forme avec son pilote italien participe aux bons résultats de son équipe nationale, avec notamment une victoire à Falsterbo et une deuxième place à Gijon et Lummen. En 2006, alors âgé de huit ans, puis en 2010, l’alezan brûlé d’Emilio Bicocchi, sacré champion d’Italie en 2009, prend part aux championnats du monde d’Aix-la-Chapelle et Lexington, lui permettant de décrocher un ISO de 178 en 2010.

Kapitol d'Argonne, formé par Paul-Anthony Roché, a connu ses plus belles heures sportives avec l'Italien Emilio Bicocchi. © Dirk Caremans / Hippo FotoGénéreux, puissant et profondément gentil, Kapitol d'Argonne ne laissait personne indifférent. © Scoopdyga

Une production intéressante

Bien qu’un produit soit né en France en 2011, le fils d’Apache d’Adriers s’est véritablement consacré à la reproduction en 2012, date de sa retraite sportive. En moyenne, un peu plus de cinquante juments ont été honorés par Kapitol d’Argonne ces dix dernières années, pour deux-cent-quatre-vingt-trois naissances enregistrés sur la base de données du SIRE. Parmi eux, quatre sont indicés à plus de 140, dont Diaz de Ush (mère par Quaprice Bois Margot, né Quincy), classée jusqu’à 1,50m avec Alix Ragot, Déclaration d’Amour (mère par Narcos II), vue jusqu’à 1,50m sous la selle d’Alice Vancrayelynghe, et Daytona du Lavoir (mère par Cento), régulière à quatre, cinq et six ans, puis passée sous selle amateur. Toutes trois sont issues de la première génération de Kapitole, tandis que Falco du Loing (ISO 145, mère par Elf d’Or), auteur d’un bon championnat de France à sept ans, continue de monter en puissance avec Eric Lelièvre. Tous deux ont ainsi terminé quatrième d’un Grand Prix Pro 1 à 1,45m le 13 août dernier, à Bonneval. De L’Oiserie (mère par Obéron du Moulin), classé jusqu’en Grand Prix 3* outre-Atlantique avec Alexandra Worthington, Delirio Delle Sementarecce (mère par Concorde), complice d’Emilio Bicocchi jusqu’en Grand Prix 4* et Coupes des nations CSIO 3*, Figueras de Laume (mère par Pezetas du Rouet), l’atypique Donatello de Bray (mère par Gio Granno), parfaitement compris et monté par Quentin Morton jusqu’en Grand Prix Pro Elite à 1,50m, Fifty Fifty du Cordel (mère par Laeken), Golden Manciaux (mère par Narcos II) ainsi que le bien nommé Génial de B’Neville (mère par Talent Platière), pépite du Canadien Mario Deslauriers,sont autant d’autres très bons représentants de Kapitol d’Argonne. Assurément, l’attachant colosse n’a pas fini de faire parler de lui, grâce à cette jeune et prometteuse production.

L'excellent Génial de B'Néville, ici à cinq ans sous la selle de Jonathan Chabrol lors de la Grande Semaine de Fontainebleau 2021, a séduit le Canadien Mario Deslauriers. © Mélina Massias