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La Tuilière, une histoire d’amour

Reportages mardi 20 juillet 2021 Oriane Grandjean

« L’amour est partout où tu regardes ». Les paroles de Francis Cabrel correspondent bien à la Tuilière. À quelques kilomètres de Genève côté français, Charlotte et Mark McAuley, couple soudé et complice, nous ont reçus dans leurs installations flambant neuves. Outre l’amour du couple, on ressent dans ce coin de paradis l’amour des chevaux. D’ailleurs, dans leurs deux familles respectives, le cheval a toujours fait partie de la vie et de l’histoire. Aujourd’hui parents de deux jeunes enfants, la Suédoise et l’Irlandais perpétuent cet amour au quotidien, dans leur couple, leur famille comme leur business. Tout semble réussir à ce sympathique duo qui fait rimer à merveille passion et ambition. Mark McAuley n’espère-t-il pas participer aux championnats d’Europe de Riesenbeck dans quelques semaines ?

Charlotte sous le regard de Mark dans le manège de La Tuilière 

Partie 1 

C’est en 2015 que Charlotte McAuley, qui porte encore son nom de jeune fille, Mordasini, fait une entrée remarquée parmi l’élite mondiale, lors du Grand Prix de Falsterbo: « Il s’agissait de mon premier Grand Prix 5*. Je partais en numéro un. J’avais une jument avec laquelle je m’entendais super bien, Romane du Theil, qui était pleine de moyens. Ce jour-là, tout semblait facile. Au barrage, j’ai été rapide. Je voyais les autres qui n’arrivaient pas à me rattraper. J’ai finalement été devancée par Janika Sprunger, qui a gagné, et Henrik von Eckermann a terminé deuxième. Même Malin Baryard-Johnsson était derrière moi avec Tornesh ! J’avais du mal à réaliser ce qui m’arrivait. En plus, je venais de commencer à monter pour la Suède (lire article de 2015) alors que je montais jusqu’alors pour la France. En Suède, le public est très patriotique : quand il y a un Suédois en piste, la tribune est en délire. Or, ils n’avaient jamais entendu parler de moi. Les premiers jours, c’était le silence total dans la foule et au fil des parcours, les gens étaient de plus en plus derrière moi. Dans le Grand Prix, quand je suis revenue pour le barrage, ils étaient à fond. C’était incroyablement motivant ! »

Charlotte McAuley devant les installations de la Tuilière, près de Genève.

Quelques mois plus tard, toujours en cette formidable année 2015, Charlotte McAuley est appelée pour jouer les réservistes de l’équipe aux championnats d’Europe d’Aix-la-Chapelle. « J’avais fait peu de 5*, donc je dois avouer avoir eu un soupir de soulagement en entendant que j’étais réserviste. Je savais toutefois que ma jument avait les moyens. J’étais d’ailleurs troisième du Grand Prix le samedi soir. On avait donc le niveau. L’année suivante, j’étais à nouveau réserviste aux Jeux Olympiques de Rio 2016 et la situation était différente j’avais plus d’un an et demi de haut niveau derrière moi avec de bonnes performances avec Romane, donc j’étais un peu déçue de ne pas sauter. Je pense qu’on aurait pu faire quelque chose de bien. Mais voilà, c’est ainsi et c’était une très bonne expérience pour moi d’y être. Si l’occasion se présente d’y retourner, ce sera un avantage. J’ai pu sentir cette atmosphère. »

Charlotte McAuley et Romane du Theil lors de la finale des Nations à Barcelone en 2016 © sportfot

L’histoire de Charlotte McAuley est une histoire de talent, mais aussi une histoire d’alchimie avec un compagnon qui l’aide à viser le sommet. Un flash-back s’impose. Nous sommes en 2010. Après deux saisons chez les jeunes cavaliers avec l’équipe de France, la jeune femme reprend des études. Elle obtient une licence en finance et management avant un master en commerce international à Paris. « Durant cette période, je n’ai pas arrêté de monter à cheval, je tournais en 3* et 4*, mais je m’y suis vraiment remise à fond à la fin de mes études. Je voulais me donner une chance de voir si cela marchait. Et cela a plutôt bien fonctionné puisque six mois plus tard j’étais dans l’équipe suédoise. C’est aussi en grande partie grâce à Mark que j’ai eu un succès aussi fulgurant. Lorsque je suis rentrée à la maison durant l’hiver 2014-2015, Mark a posé ses valises chez moi. Nous étions en couple depuis plusieurs années. Sa connaissance du haut niveau m’a vraiment fait progresser. Il était là tous les jours pour m’entraîner, cela a été une vraie transformation. Toute ma famille est dans les chevaux depuis plusieurs générations, mais personne n’avait été à haut niveau. C’est un monde à part, un mode de pensée complètement différent. Nous n’avions pas les connaissances, les infrastructures ni le personnel qualifié que nous avons aujourd’hui. Mark a amené sa connaissance technique du haut niveau. »

C'est grâce à l'aide quotidienne de Mark que Charlotte a obtenu ses plus beaux succès en 5* dès 2015. 

L’amazone dispute donc trois saisons à haut niveau avec Romane du Theil, Tiny Toon Semilly, qui fait toujours partie de son piquet actuel, ainsi que Miebello. « Ensuite, étant enceinte de notre premier enfant, j’ai passé le flambeau à Mark. »

Les installations luxueuses de la Tuilière

Le cheval a également toujours fait partie de l’univers de Mark McAuley : « Tout le monde montait à cheval dans ma famille. Mon grand-père maternel était ce que l’on appelle un huntmaster, soit un responsable de chasse à courre. À partir de mes cinq ans, deux fois par semaine, j’y participais. J’adorais cela. J’ai aussi fait beaucoup de poney-club. À partir de douze ans, je me suis focalisé sur le saut. J’ai fait énormément de concours, je montais des poneys pour différents propriétaires. En Irlande, le monde des poneys, c’est un vrai business. » En 2003, Mark McAuley participe à ses deuxièmes championnats d’Europe poney et obtient une médaille de bronze par équipe à domicile, à Necarne Castle.

Mark McAuley au travail avec Cap West, un 9 ans par Chacco-Blue.

« Quand j’ai fini de courir avec les poneys, on a acheté quelques chevaux. Mon père était cavalier de saut et faisait du commerce, ma maman montait en complet. On avait les écuries à la maison. J’y ai fait deux ans avant de partir pour un hiver aux Etats-Unis, puis de revenir en Irlande où j’ai monté une année pour Lady Georgina Forbes, l’ancienne sponsor de Jessica Kuerten, qui a un grand élevage. Mais je savais que pour devenir professionnel, je devais partir en Europe. À vingt-et-un ans, j’ai donc quitté l’Irlande pour l’Italie. D’abord à Cervia, un centre de concours magnifique, à côté de Rimini, chez Lalla Novo, une cavalière de l’équipe italienne qui avait participé à de grands championnats. J’ai monté pour elle durant deux ans, plutôt des jeunes chevaux. J’ai beaucoup aimé cela. Je voulais néanmoins me focaliser plus sur le haut niveau. Je suis rentré en Irlande à Noël, pensant retenter ma chance à la maison. Mais tout de suite, la famille italienne Menada m’a rappelé pour me proposer un emploi. Ils avaient de bons chevaux et participaient à de beaux concours. j’ai donc accepté. J’ai passé six ans à San Remo. Grâce à ces propriétaires, j’ai pu disputer des concours du Global Champions Tour, quelques coupes des Nations, et pris énormément d’expérience. Néanmoins, je rêvais toujours d’être indépendant, d’avoir ma propre structure. »

À Charlotte de continuer : « Mark n’avait pas un plan précis, il venait surtout ici pour déposer ses affaires. Il avait plusieurs pistes, notamment pour aller travailler chez de grands marchands. Au final, il est resté là. »

La suite de notre rencontre avec le couple McAuley à découvrir demain !

Photos: © Clément Grandjean