Notre site web utilise la publicite pour se financer. Soutenez nous en desactivant votre bloqueur de publicite. Merci !

“La première fois que j’ai monté Dexter, c'était simplement magique”, Johannes Farce (2/3)

Dexter
Sport mardi 12 décembre 2023 Mélina Massias

Il est l’un des meilleurs chevaux de sa génération, et sans aucun doute l’un des meilleurs du monde. Dexter Fontenis, le crack de Simon Delestre, s’est imposé cette saison en se classant dans pléthore de Grands Prix 5*. Si sa première grande victoire dans une épreuve reine l'attend encore, le fils de Diarado a déjà conquis le titre de numéro un mondial, en novembre dernier. Issu d’une excellente souche maternelle française, développée par la famille Théault, le bondissant représentant du stud-book Zangersheide perpétue la réussite de Cistria, Kampanule III, Pépita du Poncel et Gorka des Fontenis. Formé par Johannes Farce de ses quatre à sept ans, passé sous la selle de Jennifer  Hochstadter pendant une saison, puis révélé par Simon Delestre, Dexter Fontenis fait le bonheur d’Eric et Nicholas Hochstadter, qui l’ont fait naître et en sont toujours propriétaires. Retour sur la naissance d’une star, qui n’a pas fini de briller.

La première partie de ce portrait est à (re)lire ici.

“Je me rappelle encore de la première fois où j’ai monté Dexter. C’était simplement magique”, sourit Johannes Farce, cavalier formateur du bondissant Dexter Fontenis (Diarado x Voltaire) dont l’émotion demeure intacte à l’évocation de son ancien complice.  “Je me suis dit que si je parvenais à faire mon travail correctement, ce serait un crack. Lors de notre premier saut, il a monté son garrot au-dessus des chandeliers et a atterri quatre mètres derrière la croix, posant d’abord les postérieurs au sol ! Jeune, il avait un style particulièrement atypique. Il sautait un peu des quatre pieds à la fois, mais il avait déjà cette énergie et un respect fou. C’était incroyable. C’est aussi pour cela que j’ai pris mon temps avant de l’emmener en concours. C’était un plaisir de vivre cette aventure avec la famille Hochstadter. Je n’avais aucune pression de leur part et je pouvais gérer le cheval comme je le souhaitais. Il fallait être patient, et nous l’avons été. Il faut aussi des propriétaires qui nous permettent de faire cela. C’est comme Marie Pellegrin, avec qui je travaille également ; si l’on veut aller en concours, on y va, sinon, ce n’est pas grave. Et si les chevaux commettent une faute, il n’y a pas mort d’homme. C’est de cette façon que les chevaux apprennent leur métier.”Dexter Fontenis et Johannes Farce. © Agence Ecary

“J'ai rarement eu un cheval aussi respectueux”, Johannes Farce

Tout comme Simon Delestre après lui, Johannes a dû apprendre à composer avec la fougue et l’énergie débordantes du petit Dexter. “Il avait besoin de réussir à se servir de son encolure. Il pouvait se mettre très haut. J’ai donc toujours recherché le relâchement et le calme, afin qu’il accepte de s’étendre et d’aller vers le bas. J'ai eu la chance d’utiliser les installations de Michel Robert, pour qui j’ai travaillé pendant plusieurs années. J’avais donc un bon exemple pour faire travailler un cheval comme Dexter”, loue le formateur de l’actuel deuxième meilleur cheval du monde selon le classement mensuel édité par la Fédération équestre internationale (FEI). “Lorsque je le faisais sauter à la maison, c’était uniquement dans le but qu’il se détende, qu’il prenne le temps et place bien sa trajectoire. Le reste était inné. Je sautais très peu de combinaisons, voire jamais, et me concentrais davantage sur des obstacles isolés. Les barres n’étaient jamais hautes ; il n’en avait pas besoin. Le plus grand défi avec lui est de l’avoir calme, et c’est encore ce que recherche Simon aujourd’hui. J’ai rarement eu un cheval aussi respectueux. Il ne fallait surtout pas qu’il touche une barre avant d’entrer en piste, sans quoi il s’inquiétait et devenait difficile à gérer. Pour un petit cheval, Dexter a une immense action. S’il peut affronter les parcours qu’il affronte aujourd’hui, c’est en partie grâce à sa propulsion et sa trajectoire hallucinantes.”

Le superbe Dexter Fontenis dans les bois. © Collection privée



Johannes se remémore un cheval “très gentil” et “indépendant”. Facile au quotidien et sans vice, Dexter aura assurément marqué son ancien pilote. “Certains très bons chevaux peuvent parfois se montrer un peu compliqués au début, mais ce n’était pas le cas de Dexter. Tout était facile avec”, plaide Johannes. En plus de Dexter, Johannes s’est aussi vu confier ses deux sœurs, Aurea des Fontenis (Dollar dela Pierre) et Birdy des Fontenis (Number One d’Iso). La première a été croisée cette année au jeune et fort prometteur Hitchcock Bois Margot, tandis que la seconde a mis au monde son premier poulain en mai dernier, un mâle par Malito de Rêve prénommé Newyork Lemon Q and J par sa naisseuse, Julie Gayet. “Birdy était assez semblable à Dexter, dans le sens où elle était aussi très respectueuse et avait beaucoup de trajectoire. En revanche, elle était très spéciale mentalement. Aurea a fait de bons parcours à cinq et six ans, puis a été vendue. C’est marrant parce qu’Eric Hochstadter m’a toujours dit que le troisième produit de Gorka des Fontenis était le vrai crack du lot”, précise-t-il. 

Malgré l'intérêt de plusieurs champions olympiques, Dexter ne change pas de mains

En 2020, et après ses premiers classements à 1,40m, Dexter attise les convoitises. “Mon père, qui est le propriétaire de Dexter, est très attaché aux chevaux. Il n’est pas du tout dans l’aspect commercial des choses. À la fin de l’année de sept ans de Dexter, Steve Guerdat s’est intéressé à lui. J’ai alors dit à mon père que si quelqu’un venait l’essayer et était prêt à l’acheter au prix fixé, il fallait le vendre. Je crois qu’il n’aurait pas été prêt à le faire. Alors nous avons discuté avec Johannes pour envisager la suite pour Dexter. Nous avons trouvé un terrain d’entente et Dexter n’a pas été essayé. Il a rejoint le piquet de ma fille, Jennifer, comme le souhaitait son grand-père”, développe Nicholas Hochstadter, qui suit désormais attentivement le fils de son ancienne jument de Grand Prix, Gorka des Fontenis. 

Jennifer Hochstadter a toujours eu de bonnes sensations en montant Dexter Fontenis. © Sportfot

De fait, l’aventure entre Johannes et Dexter a touché à son terme au milieu de l’année 2020, sans la moindre amertume, avec le sentiment du devoir accompli et des souvenirs plein la tête. “Si je ne devais en garder qu’un, ce serait le dernier parcours que nous avons fait ensemble. C’était fou. Beaucoup de personnes commençaient à s’intéresser à Dexter, à venir le voir au paddock et en piste. D’un côté, il y avait beaucoup de pression, mais d’un autre, il n’y en avait pas du tout ! J’étais tellement sûr de sa qualité ! En abordant le dernier obstacle, j’ai souri et avancé la main. Je savais qu’il ne ferait jamais faute. J’avais une confiance aveugle en ce cheval. Pendant son année de sept ans, nous avons dû faire dix ou douze sans-faute de suite. C’était un bonheur. Parmi tous les parcours que j’ai faits avec Dexter, j’ai dû faire deux parcours à huit points. Son respect était vraiment extraordinaire”, savoure encore aujourd’hui le Rhônalpin, qui reçoit régulièrement des nouvelles de son ancienne pépite et à qui il apporte des carottes dès qu’il en a l’occasion. 

Même s'il ne monte plus Dexter Fontenis, Johannes Farce est toujours en contact avec la famille Hochstadter et ne manque pas une miette de sa carrière. © Scoopdyga



Passé aux rênes de Jennifer Hochstadter à l’automne 2020, Dexter Fontenis poursuit ses démonstrations. La jeune femme, alors tout juste âgée de dix-sept ans, évolue jusqu’à 1,35m avec le précieux bijou de la famille. “Dexter était très agréable à monter. On peut le voir, il a une technique un peu particulière, une façon de sauter bien à lui. J’étais toujours ravie de le monter parce que je savais que quoi qu’il arrive, j’aurais de super bonnes sensations. Il a un style incroyable, une telle envie de bien faire et est si respectueux ! Il ne veut jamais toucher les barres”, se remémore avec bonheur la représentante du Liechtenstein, lauréate d’une épreuve U25 au CHI de Genève avec le génial Tinka’s Hero, jeudi 7 décembre. “À un moment donné, j’ai eu du mal à canaliser Dexter. Il pouvait avoir des réactions imprévisibles, qui semblaient sorties de nulle part. Je pouvais être en train de travailler tranquillement, puis il pouvait bondir en l’air. Il a aussi une très grande foulée, ce qui me rendait la tâche difficile en parcours. Comme sa mère, je pense que Dexter aurait pu sauter par-dessus un cercle de feu. En piste, il pourrait franchir n’importe quoi. Il n’a qu’une envie : y aller et tout donner. Il veut vraiment bien faire. Il a besoin d’être serein dans sa tête pour montrer tout son talent. À pied, Dexter est un amour. Un vrai nounours ! Il est tellement attachant. C’est vraiment un chouette cheval.”

Jennifer Hochstadter et Dexter Fontenis en action. © Sportfot

Le choix de la raison

Et Nicholas de compléter : “Jennifer et Dexter ont réalisé une saison incroyable ensemble, en étant très souvent sans-faute. Mais Dexter pouvait parfois se montrer compliqué, notamment au paddock d’entraînement. Il lui arrivait de ne pas pouvoir faire le moindre saut avant d’entrer en piste. C’était assez particulier. Nous nous sommes tout de suite rendu compte que Dexter était un cheval très spécial et très délicat. Comme Jennifer ne montait pas encore de façon régulière, elle n’avait pas forcément les solutions pour le faire passer au cap supérieur à cette époque-là. Alors, nous avons pris la décision d’opérer un changement de cavalier. Plus les barres montaient, plus la gestion de l’amplitude de Dexter devenait compliquée dans les lignes et les combinaisons. Dexter est extrêmement respectueux et nous aurions pu faire une bêtise. Comme nous le faisons souvent avec H Jumping entre Simon et Jennifer, nous avons fait un switch et Dexter a intégré le piquet de Simon.”Pour son premier Top Ten Rolex IJRC, Dexter Fontenis a signé une belle prestation, terminant quatrième. © Mélina Massias

Photo à la Une : Dexter Fontenis en sortie de piste à Aix-la-Chapelle. © Mélina Massias

La troisième et dernière partie du portrait consacré au deuxième meilleur cheval du monde est disponible ici.