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Haut niveau et bien-être animal : quelle compatibilité ?

Sponsorisé samedi 11 juillet 2020

L’après-pandémie va bouleverser le secteur équestre et donc le système actuellement en place. Alors que de nombreux acteurs s’interrogent sur ce à quoi ressemblera la période post Covid-19, Studforlife s’est penché sur la compatibilité entre le système actuel et le bien-être animal. En effet, si le bien-être animal est devenu un leitmotiv ces dernières années, les chevaux n’ont jamais été autant mis à l’effort. Nous avons donc interrogé deux experts, Eric LOURADOUR et Patrick BARTOLO, afin de répondre à cette nouvelle « Question du mois » !

Patrick BARTOLO, juge international : « Pour moi, le bien-être animal est un traitement qui a pour conséquence que l’animal soit heureux, ne souffre pas, n’ait pas de crainte et soit traité au mieux de sa condition afin d’avoir une vie agréable en jouissant d’une excellente santé. Il y a une véritable prise de conscience depuis quelques années dans notre milieu et je trouve que très majoritairement, le bien-être des chevaux est aujourd’hui une priorité aux yeux de tous. Il est au centre des préoccupations du système même s’il est vrai que, comme dans tout système à plusieurs acteurs, il y a quelques brebis galeuses qui ne le respectent pas.

Le nombre de CSI 5* a explosé ces dernières années avec pas moins de quatre-vingts concours de ce niveau organisés en 2019. La question de l’éthique et du bien-être animal ne se pose pas pour les cavaliers disposant d’un piquet fourni puisqu’ils peuvent gérer les efforts imposés à leurs montures ainsi que les concours. Le problème se situe donc plus au niveau des cavaliers qui n’ont pas d’autre choix pour évoluer dans le classement, ou qui ont choisi d’en faire uniquement un métier à rentabilité élevée, que d’enchainer les concours. Dans ce cas-là, on ouvre la voie aux dérives et au non-respect du bien-être des chevaux. La solution n’est pourtant pas compliquée à mon sens. Il suffirait de ne plus seulement ouvrir les grandes manifestations aux cavaliers qui sont dans le top mais également aux couples et/ou aux cavaliers de la jeune génération « méritants ». Plusieurs options pourraient voir le jour comme la limitation à un nombre raisonnable de participations annuelles ou de distances parcourues ou encore l’instauration d’un certain nombre de jours de repos. On pourrait ainsi garder le même nombre d’événements et permettre à des jeunes, ou moins jeunes, qui ont trouvé le cheval de leur vie ou amené un jeune cheval au niveau requis, de participer à ce genre de concours et d’avoir une chance d’émerger à haut niveau.

Il y a eu beaucoup de controverses récemment liées au bien-être des chevaux. Je vais donc aborder certains thèmes qui ont suscité le débat. J’insiste sur le fait que si ces questions se posent aujourd’hui c’est parce qu’il y a une réglementation inadéquate ou trop floue derrière, ce qui engendre le doute et donc différentes interprétations de ces règles.

Commençons par l’utilisation des guêtres postérieures. Je ne suis ni vétérinaire ni spécialiste de la locomotion équine. Mais sans être un expert, dès qu’il s’agit d’utiliser un artifice de ce type, il semble logique que ce soit pour compenser un défaut ou une faiblesse. Si l’on devait comparer avec des athlètes humains (en laissant de côté l’éternel « l’animal n’a rien demandé »), il est possible de s’aider avec des poids ou des élastiques en les utilisant correctement et en mesurant les efforts requis pour corriger un défaut par exemple, mais jamais en compétition ! Pour la réglementation de la Fédération équestre internationale, je trouve paradoxal qu’on démontre la dangerosité de ces guêtres mais qu’elles ne soient interdites qu’à terme en 2021 avec comme prétexte le fait que certains ont pu se qualifier aux Jeux Olympiques 2020 grâce à ce « système » et qu’il serait injuste de priver les autres des mêmes artifices. Cela revient à autoriser l’ensemble des cavaliers à mettre en danger la santé de leurs montures afin qu’ils soient tous sur un pied d’égalité.

Concernant la controverse sur les traces de sang sur les flancs des chevaux qui amène directement à une disqualification du couple, je trouve la réglementation aberrante en l’état ! Encore un exemple de la déresponsabilisation des officiels par les instances de la FEI ! À croire que les juges ne sont pas capables d’apprécier une griffure, une piqûre de moustique ou de la cruauté. Il fallait se donner bonne conscience en disant qu’une trace de sang est forcément indigne, car volontaire, sans laisser les officiels juger et sanctionner selon la situation !

Concernant le débat sur la contamination des chevaux en concours, là aussi nous touchons injustement à la fameuse tolérance zéro. Dans ce cas, il faudrait se donner les moyens de ses ambitions, or tous ceux qui ont déjà assisté à un CSI 5* savent très bien comme il est simple de contaminer un cheval à n’importe quel moment. On ferait mieux de définir des seuils, des produits, des effets plutôt que des virgules. De sanctionner durement les abus et d’apprécier des circonstances mais pour cela, il faudrait déjà partir du principe – assez helvétique je vous l’accorde – que l’athlète est honnête et non l’inverse.

La qualité douteuse de certaines infrastructures de concours fait aussi partie des sujets qui prêtent à controverse. La raison est simple : tant que le système des étoiles des compétitions internationales sera attribué en fonction de l’argent distribué, cette situation sera inévitable ! Depuis des années, nous devons remettre à tous les stakeholders des questionnaires dont personne ne connait les résultats. Mais lorsqu’on voit combien il faut de temps pour mettre en place quelque chose à la FEI (et je ne parle même pas de répondre à un courrier) on se demande à qui profite le plus le système…

La pandémie actuelle rebat beaucoup de carte. Je pense comme certains cavaliers que cette pause forcée est bénéfique à beaucoup de chevaux. Je ne pense pas que les chevaux soient en manque de concours comme certains cavaliers le suggèrent actuellement. Ils sont bien dans leurs prés à profiter. Par contre il faut également se rendre compte que l’humain, en haut de la chaine alimentaire, ne va pas laisser en liberté tous les chats d’appartements, les chiens en laisse, les poissons en bocaux ou autre animaux de vivarium. Aujourd’hui, un cheval ne vivrait plus sans l’humain dans notre environnement, c’est un fait et heureusement il a su s’adapter. Et je suis tout de même persuadé que les chevaux aiment les concours !

La crise sanitaire actuelle peut pousser le système à évoluer. Je pense qu’auparavant les intérêts étaient trop grands pour que quoique soit bouge. On réalise qu’aujourd’hui rien ne sera plus comme avant. La FEI va peut-être se rendre compte que sans concours, sans organisateurs ou sans cavaliers-payeurs, ils ne reçoivent pas de taxes et pas de revenus. Elle va peut-être voir que les sponsors ne sont pas si simples à trouver et que la toute-puissance de l’argent a ses limites ! Elle va peut-être aussi commencer à écouter les cavaliers, les organisateurs, les propriétaires, les grooms, les techniciens, les gens qui pour certains vivent de ce sport, mais qui pour la majorité sont des passionnés.

Je pense qu’il serait grand temps de réunir l’ensemble des acteurs de la filière afin de construire ensemble le système de demain. En écoutant certains, on pourrait progresser au lieu de les tenir éloignés en essayant d’édicter des règles toujours plus contraignantes. Il serait aussi intéressant de montrer les efforts qui ont été consenti depuis plusieurs années en matière de bien-être animal. Notre sport a beaucoup évolué dans le bon sens avec, par exemple, le matériel à disposition comme les fiches de sécurité ou les barres beaucoup plus légères. Il faut montrer ce que nous faisons de bien et inviter ceux qui en doutent à le découvrir par eux-mêmes en les accompagnant. »

Eric LOURADOUR, entraineur de saut d’obstacles renommé : « Le bien-être animal est pour moi un concept essentiel. Lorsqu’une personne adopte un animal elle s’engage envers lui à le respecter, à l’aimer, à le protéger et à lui être fidèle. Les animaux, comme les personnes, aiment se sentir aimés et apprécient les belles et bonnes choses. L’homme a donc à mes yeux le devoir d’apporter un équilibre et une belle vie à n’importe quel animal, autant que faire se peut.

Je pense que les chevaux ont beaucoup plus de bien-être aujourd’hui qu’il y a encore trente ans. De nos jours, on sait qu’il est important qu’un cheval puisse avoir une fenêtre vers l’extérieur, qu’il ait un minimum de rapport tactile avec son voisin de boxe, qu’il aille un minimum au paddock, etc. En Suisse par exemple, si vous construisez une écurie neuve, vous avez l’obligation de respecter ce genre de détails indispensables au bien-être des chevaux et ces derniers doivent avoir un accès direct du box au paddock. En revanche, j’ai beaucoup entendu qu’un cheval est mieux dans un pré qu’à l’écurie. Je ne pense pas qu’un cheval soit heureux en permanence au pré, surtout s’il est seul, s’il fait chaud, s’il n’a pas d’abri, si l’espace est trop réduit, s’il n’a pas d’affection, d’attention, de soins, trop d’insectes. Les chevaux voyagent aussi maintenant dans des camions très confortables, ils ont beaucoup de soins et d’attentions, sortent minimum deux à trois fois par jour. Chez moi par exemple, les chevaux sont montés le matin puis vont au paddock en couple et y restent jusqu’à seize ou dix-sept heures, avant d’aller au marcheur, au pas, trente minutes. Ensuite nous leur faisons les soins et les pansages.

En revanche, concernant le rythme des compétitions, je suis vraiment effrayé de voir que certains cavaliers ne sont pas assez respectueux de leurs chevaux. Et cela quel que soit le niveau. Au bas niveau, les cavaliers débutants ne sont pas assez bien sensibilisés sur l’amour et le respect que l’on doit au cheval. Au haut niveau en revanche, c’est souvent l’égo, la soif de victoire, d’argent ou de plaisir mais aussi la chasse aux points pour le classement mondial qui incitent les cavaliers à exagérer. Chacun d’eux ne devraient pourtant jamais oublier qu’ils sont venus vers l’équitation par fascination et amour du cheval et non pour la compétition. Sinon ils auraient pu faire de la moto. Certains cavaliers diront qu’ils adorent leurs chevaux et que, pour preuve, ils n’hésitent pas à faire venir régulièrement le vétérinaire, l’ostéopathe ou divers intervenants. Ces derniers, ayant donc le sentiment de tout bien faire, prétendent pouvoir sur-exploiter un cheval. Ils en oublient la base. Ils devraient savoir que le meilleur remède pour un cheval est le repos et que la juste planification du travail et des concours, associée à une bonne méthode d’équitation, évitent toutes ces démarches faites principalement pour se donner bonne conscience. En outre, en plus d’être dommageables pour le cheval, elles sont très onéreuses pour le propriétaire du cheval.

La crise sanitaire a permis à beaucoup de chevaux de souffler et je trouve dommage qu’il faille une pandémie pour sensibiliser les personnes à changer de mentalité. La « pause hivernale », comme nous avions obligatoirement chaque année dans le temps, est indispensable, surtout quand on demande beaucoup et souvent à son cheval. Ces périodes, en plus de donner du repos au cheval, permettent aux cavaliers de se remettre en question, de travailler pour s’améliorer et ainsi de peaufiner leur équitation et leur relation avec le cheval. J’ai eu beaucoup de chance d’avoir été éduqué sur le plan équestre à une époque où l’on passait plus de temps au travail et à la préparation aux concours que vraiment en compétition. Cette dernière était vraiment la cerise sur le gâteau. Quand nous y allions, nous nous efforcions d’avoir le sentiment d’être prêt techniquement et d’être vraiment en osmose avec notre cheval. Nous acceptions une méthode et une progression lentes, concentrées sur la juste équitation, le bien-être de notre compagnon et la sécurité. De plus, on nous sensibilisait également sur l’aspect financier.

Quelles joie, passion et énergie nous mettions afin que nos chevaux soient en concours les plus heureux, les plus propres ou les plus beaux. Nous les aimions superbement toilettés et y passions un temps fou (pansage, tresses à la crinière, queue nattée, motifs sur la croupe, etc). On les choyait afin de les remercier pour le bon temps qu’ils nous concédaient, par amour et par respect mais aussi pour leur faire apprécier le concours. Ainsi, on entendait souvent dire que certains chevaux aimaient le concours. Eh bien oui, c’était une réalité ! Les chevaux adorent la compagnie de l’homme, plus nous leur donnions de notre temps et de notre affection et plus ils pardonnaient aisément nos erreurs de cavaliers débutants et maintenaient le moral haut et l’esprit généreux. Quand les chevaux ressentent de l’amour, de la passion, du respect, de la confiance, de la sérénité, de la sincérité, ils nous donnent tout ! On sait aujourd’hui que les chevaux sont capables de lire nos émotions ou nos humeurs.

Aujourd’hui malheureusement, la compétition semble passer avant le plaisir et la passion. Pour preuve, certains parents sont prêts à se mettre en difficultés financières pour faire plaisir à l’enfant roi, le système fédéral des enseignants pousse à la consommation et à la compétition. On peut pourtant faire de l’équitation sans penser obligatoirement compétition. Tout comme une personne peut apprendre à jouer du piano sans penser faire un concert ou bien apprendre à jouer au tennis et ne jamais vouloir faire un tournoi. Les fédérations et les enseignants devraient plus inciter leurs adhérents à venir vers l’équitation en les sensibilisant sur l’amour et le respect pour l’animal et à travers bien des activités diverses et variées qui peuvent se pratiquer avec les chevaux, sans pour autant aller et penser compétition. Les fédérations équestres nationales doivent aussi, à la base, former des enseignants qui inciteront les néophytes à découvrir le monde du cheval en insistant sur l’amour et le respect pour l’animal, le bien-être et l’importance de bases solides pour pouvoir progresser en toute sécurité. N’oublions pas que ce sport est plus dangereux que la Formule 1 et que grand nombre d’accidents arrivent par négligence des règles de sécurité et manque de professionnalisme, compétences ou sérieux de l’instructeur. L’équitation est le seul sport où la personne n’est pas toujours un réel sportif, ni dans le physique ni dans l’esprit, en tous cas au bas niveau : souvent pas d’échauffement, pas de sports en parallèle, pas de progression faite d’étapes  franchises pour accéder à un examen obligatoire, etc. Dans la plupart des autres sports, si vous n’avez pas les bonnes bases et une certaine progression, vous ne pouvez pas accéder à des compétitions toujours plus importantes.

J’éduque personnellement mes élèves afin qu’ils privilégient avant tout un « bon dressage » en insistant sur la biomécanique et la juste relation homme-cheval : équilibre physique et psychologique, connaissance de l’animal et d’une juste méthode d’équitation. Le cheval qui utilise correctement son corps et a une bonne propulsion, possède une meilleure capacité à sauter correctement. Le bon cavalier ne devrait pas avoir besoin d’utiliser des artifices comme les guêtres postérieures qui endommagent physiquement le cheval. Malheureusement, dans le système actuel, ces ustensiles correctifs peuvent constituer une valeur ajoutée sur quelques chevaux n’ayant pas un grand passage de dos ou bien pour corriger une certaine insensibilité à toucher les barres avec les postérieurs. Aux vues de la technicité des parcours d’aujourd’hui et de la légèreté des barres, ces guêtres peuvent également rassurer certains cavaliers qui ressentent la nécessité de les utiliser parce que tout le monde le fait et qu’ils souhaitent être à égalité avec les autres concurrents. Quoi qu’il en est, là encore, les fédérations doivent réagir. Les amateurs ou les débutants ne devraient pas avoir la permission de les utiliser et les excès de certains professionnels doivent être sévèrement sanctionnés. Dans l’idéal, je pense qu’il faudrait mieux abaisser le niveau technique des épreuves au haut niveau et interdire complètement ce genre de guêtres. Tout cavalier ne doit jamais oublier que l’équitation est un art, que le sport est éthique, que le cheval est un être vivant mais aussi le principal athlète dans le couple et qu’il mérite donc doublement respect et amour. Le bon cavalier doit être plus exigeant envers lui et moins envers son compagnon. Il doit savoir améliorer son cheval par une bonne méthode d’équitation, une bonne gestion et la faculté innée ou apprise à éviter l’erreur en jouant de son talent, de sa position ou de sa technique.

Pour cela, je le répète encore et toujours, je suis admiratif de Steve GUERDAT, à la fois pour son équitation mais également pour la gestion de ses chevaux et de sa carrière. Il mérite sa place de numéro un mondial et il doit être une source d’inspiration pour tous. Pour ma part, je suis en train de former des chevaux de qualité pour le haut sport mais en respectant des rythmes lents, leur physique, leur mental et surtout leur croissance. Il ne faut pas oublier qu’un cheval finit sa croissance seulement entre sept et huit ans et que le dos est la dernière partie de son corps qui évolue. Sachant qu’un cheval est monté depuis l’âge de trois ans et pas toujours par de bons cavaliers à l’assiette stable ou légère, on peut comprendre pourquoi il est indispensable d’agir avec délicatesse, lenteur, progression et une gestion respectueuse de l’animal. Ce n’est pas pour rien que c’est la partie du corps du cheval la plus traitée par les vétérinaires. Dans ce groupe de jeunes chevaux, j’en ai quatre de huit ans qui ont fait seulement quelques épreuves à cinq ans. À six ans aucun concours et six mois de prairie. À sept ans six parcours et six mois de prairie. Je veux les amener progressivement l’année prochaine sur des épreuves de 1.45m. À dix ans ils rejoindront, je l’espère, des écuries de certains des meilleurs cavaliers mondiaux. Ces chevaux n’ont jamais vu le vétérinaire. C’est incroyable de voir leur évolution et transformation tant sur le plan physique, mental que technique. J’ai déjà fait cette expérience il y a plus de vingt ans avec quatre chevaux qui ont tous ensuite participé à des CSIO.

Un autre point que j’estime important à aborder, l’éthologie. Aujourd’hui, c’est très tendance. Mais là encore c’est une question de marketing et souvent certaines personnes font des amalgames ou manquent de connaissances. Dans les sports équestres, il y a toujours eu de grands hommes de chevaux qui faisaient preuves de grand tact, connaissance, amour et respect pour les chevaux et qui savait parfaitement comment réagir en fonction de l’animal qu’ils avaient devant eux. Ils utilisaient une méthode douce, lente et juste dans le rapport homme-cheval. Ce que je n’aime pas avec l’éthologie d’aujourd’hui c’est ce rapport de dominant à dominé. Les vrais hommes de chevaux savent faire comprendre au cheval quand il fait bien ou mal, mais dans un rapport égalitaire : « demander souvent, se contenter de peu, récompenser beaucoup ». C’est ce que j’aime et ce que j’ai eu la chance d’apprendre. Tout au long de ma carrière sportive j’ai eu des chevaux qui s’arrêtaient ou qui posaient de réels problèmes à bien des grands cavaliers de haut niveau. J’ai toujours résolu les soucis et pu gagner avec eux grâce au bien-être et à la belle relation de respect que j’avais avec mes chevaux.

Pour aborder également le sujet des concours, je trouve qu’en général la qualité des terrains et l’organisation des compétitions se sont vraiment améliorées. Peut-être en revanche que certains organisateurs se focalisent un peu trop sur le bien-être des personnes (concours tape à l’œil dans une recherche de fonds, d’ambiance, de vente de tables VIP et de droits d’entrées) et moins sur le bien-être des chevaux (boxes parfois petits et trop fragiles ou installés sur des terrains dommageables en cas d’intempéries, pas de terrains d’exercices pour travailler les chevaux hors épreuves car concours surbooké et peu d’espace, etc). Je comprends en revanche qu’organiser des compétitions n’est pas tout simple, il faut aussi laisser à certains le temps d’évoluer et de grandir. Je suis du signe de la balance et, en tant que tel, je pense que l’équilibre doit être trouvé. En revanche, donner le label cinq étoiles à un concours qui n’est pas à la hauteur au niveau du cahier des charges n’est pas très sérieux de la part de la FEI. La dotation des épreuves ne devrait pas être le principal critère d’attribution des étoiles.

Aujourd’hui on peut observer les lacunes de nos comportements, de notre mode de vie et de pensées dans bien des secteurs dont le sport. Les chevaux ont toujours permis à l’homme, et cela depuis plus de six mille ans, d’évoluer, de se nourrir, de voyager, de gagner des guerres, de travailler la terre, de se soigner et dernièrement de se divertir. On leur doit le respect le plus total et je suis certain qu’ils peuvent encore nous aider bien davantage dans le futur. J’espère que dans un monde proche, et vu les circonstances actuelles qui laissent tout de même à réfléchir, que bien des mentalités et visions de vie vont changer. Y compris dans notre milieu. Il en va de la responsabilité de chacun, dans l’intérêt commun et le futur de notre sport. Les crises servent à réfléchir et à réagir. Pour ma part, j’ai confiance et je reste positif pour le milieu du jumping. Nous avons une discipline équestre qui est de mon point de vue, et par rapport à toutes les autres, la plus naturelle pour un cheval. Si nous savons maintenir un niveau technique et des règlements qui respectent l’animal ainsi qu’une vraie éthique sportive, alors il n’y a pas de crainte à avoir. Notre sport va continuer à plaire, à passionner, car les chevaux sont vraiment fascinants. L’équitation étant un véritable Art, elle va continuer à être une des meilleures écoles de la vie pour nous inviter à savoir vivre ensemble dans le respect. »

Propos recueillis par Manon LE COROLLER. Photo à la Une : © Sportfot.com