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Giulia Martinengo Marquet sait révéler les talents de demain

Reportages mardi 13 août 2019 Oriane Grandjean

Dans cette deuxième partie de la rencontre avec Giulia Martinengo Marquet, il est question de ses installations, de son organisation et d'Elzas, qui s'est révélé cette année en prenant la deuxième place du Longines Masters de Lausanne la cinquième place du Grand Prix de Rome et en signant un triple sans-faute dans la Coupe des Nations de St-Gall.

Vous habitez un véritable coin de paradis à côté du Lac de Garde. Comment avez-vous choisi cet endroit ? 

Nous sommes installés ici depuis quinze ans. Nous sommes d’abord tombés amoureux de la maison. Nous avons commencé très doucement, en fixant des priorités. Car entre la maison et la forêt qui borde la propriété en contrebas, il n’y avait rien. Nous avons d’abord construit l’écurie, le manège et la carrière. Durant un an, nous avons travaillé sur la moitié de la carrière. Ensuite, nous avons continué d’agrandir. C’est un domaine privé, mais nous aimons avoir des gens autour de nous et voir des écuries pleines. C’est un endroit vivant, avec plusieurs écuries. Nous prenons volontiers des professionnels qui ont leur organisation avec leurs grooms. Le matin, quand tu montes sur la carrière, tu n’es pas tout seul.

La belle maison de Giulia et Stefano.

Le cadre est bucolique, mais vous êtes loin du centre de l’Europe où la majorité des concours se passent…

Nous avons beaucoup discuté avec Stefano au moment de nous installer ici. Stefano a deux enfants d’un premier mariage et ils étaient souvent avec nous donc il n’avait pas envie de partir. Ensuite, nous sommes vraiment tombés amoureux de cet endroit et de sa qualité de vie. Nous sommes très attachés à l’Italie, bien plus que nous ne le pensions. C’est vrai que nous perdons peut-être quelque chose à rester ici, parce qu'il y a plus de mouvement à l’étranger. C’est aussi le cas quand tu cherches un cheval. Lorsqu’on te dit qu’un cheval est à vendre, le temps que tu te rendes sur place, tu seras seulement le quatrième ou cinquième cavalier à l’essayer et il sera peut-être même vendu avant que tu n’arrives mais l’Italie est l’Italie, et nous ne regrettons pas notre choix. 

Depuis le manège, la vue est imprenable sur les collines avoisinantes et la région du Lac de Garde.

Et pour les chevaux, cela a-t-il un impact ? 

J’ai un super groom. Il est formidable. Si tu lui dis que tu dois aller à Honolulu, il se débrouillera pour y arriver ! Tu n’as rien à organiser. Il conduit bien, les chevaux sont tranquilles donc même s’il y a un peu plus de route pour aller au concours, cela ne fait rien. 

Dans les écuries avec Douce Emeraude d'Or.

Parlez-nous de l’organisation de l'écurie…

On dit souvent que c'est un sport individuel mais c'est grâce au travail de toute une équipe que tu peux réussir. Je voudrais remercier les grooms, les cavaliers maison, le stable manager, les maréchaux, les vétérinaires, le responsable de ma communication et mes sponsors. Quant à moi, je peux rester concentrée sur le sport. Chez nous, il y a plus de soixante chevaux, dont quinze qui constituent mon piquet. Je me mets très tôt sur mon premier cheval et j'enchaîne ensuite, parce que je n'aime pas monter l'après-midi. Je préfère monter tous mes chevaux tous les jours plutôt que de les travailler en alternance. Nous pouvons procéder comme cela grâce à notre stagiaire, Camilla. Il y a la partie de l’échauffement, avec le trotting et les galops rênes longues, que ma cavalière peut très bien faire, puis vingt à trente minutes de travail intense. Camilla me les chauffe et je me mets en selle ensuite pour faire la deuxième partie du travail, ce qui me permet de tous les travailler. J'ai aussi la chance que Stefano continue de monter deux ou trois chevaux chaque jour.

Qu’en est-il des autres chevaux que vous avez dans vos écuries SGH Stables (pour Stefano et Giulia Horses) ?

Il y a Beatrice Guidi qui monte plutôt les jeunes, à la maison et en concours. J’ai actuellement deux six ans que je monte moi-même – Princy (Casall), par exemple, que je monte depuis ses quatre ans. Il n’y a pas de règle stricte, mais en général c’est comme cela. Beatrice travaille les jeunes, elle est suivie par Stefano et par Jos Kumps lorsqu’il vient. 

Beatrice Guidi, la cavalière des jeunes chevaux.

Avec autant de chevaux, et notamment beaucoup de jeunes, faites-vous du commerce ?

Oui. Ce n’est pas une écurie de commerce où des clients viennent essayer des chevaux tous les jours. On travaille principalement pour garantir la relève. Evidemment, nous vendons des chevaux mais cela se passe plutôt parce que le cheval sort en concours et tape dans l’œil de quelqu’un. C’est comme cela que les ventes se passent, en général.

Giulia et Daytona de la Caccia.

Et vos infrastructures ? 

Il y a une carrière en sable et une autre en herbe, un marcheur, un tapis roulant, un manège couvert et dix paddocks en herbe. Je trouve important que tous les chevaux aillent au moins deux heures au paddock par jour. 

Chevaux et chiens profitent de la dolce vita à l'italienne...

Quel est le programme de vos chevaux de tête ? 

C'est important que tous les chevaux sortent plusieurs fois par jour et qu'ils profitent quotidiennement du paddock. Durant la saison de concours, nous nous contentons de les maintenir en forme et, surtout, nous faisons tout pour qu’ils gardent le moral. Ils font beaucoup de balade, et évidemment il y a quand même des jours où je les travaille de manière plus intense. Elzas et Casper vd Rode Poelhoeve (Casall) sont des chevaux qui ont un caractère très facile. Casper progresse beaucoup en piste, et Elzas est plutôt du genre fainéant à la maison. Personne ne voudrait l’acheter s’il le voyait à la maison ! Par contre, une fois en piste, c’est un vrai guerrier. 

Racontez nous l’histoire d’Elzas (Diamant de Semilly)…

Normalement, nous n’achetons pas de chevaux de huit ans mais uniquement des jeunes. Cette fois-ci, nous sommes allés en France essayer plusieurs jeunes chevaux chez Guillaume Roland Billecart et il nous a dit qu’il montait aussi un bon huit ans. C’était Elzas. Au final, on a pris Elzas et pas les jeunes. La vie vous offre parfois des opportunités que vous ne devez pas rater, même si cela fait changer vos plans. Il avait tout de même encore besoin de prendre un peu de maturité, il était presque trop chaud en piste, un peu sensible. Je l’ai pris à Barcelone l’an passé, il a fait 3d’une épreuve le dimanche, il a gagné un Grand Prix d'un CSI 2*. Cette saison, il a commencé par gagner à Oliva et ensuite… il a explosé au haut niveau. Il était prêt mentalement.

Elzas et Giulia lors des Longines Masters de Lausanne, où le couple a pris la deuxième place du Grand Prix.

Comment gère-t-on de front une carrière sportive et une carrière de maman ? 

J’ai de la chance d’avoir une super équipe autour de moi. Les grands concours ont souvent lieu l’été donc ma fille Bianca peut venir avec nous. On n’a pas de grands-parents à côté de la maison, mais nous avons la chance d’être comme une grande famille dans cette écurie. Les gens travaillent ici depuis très longtemps et les cousins de Bianca habitent aussi au manège. Si elle ne peut pas nous suivre à cause de l’école, il y a toujours quelqu’un pour veiller sur elle et nous l’amener en temps voulu au concours. Cela marche très bien.

Ici, Elzas et Giulia en piste lors des Longines Masters de Lausanne.

La saison de Coupe du monde est-elle un objectif pour vous ? 

J'aimerais bien participer à ce circuit dans le futur mais à l'heure actuelle, je n'ai pas un piquet de chevaux suffisant. Par le passé, j'ai pu monter à Oslo, Helsinki, Stuttgart et bien sûr Vérone, mais ce n'était pas pour faire la finale, c'était pour me maintenir à un bon niveau. 

Le carré de sable jouxte le manège et les écuries.

Comment planifiez-vous votre saison ? 

On commence toujours la saison à Oliva, depuis huit ans. On aime bien pouvoir aller à la mer. Le tour est parfait pour recommencer. Tu peux amener tous tes chevaux, les jeunes, les plus expérimentés, et ceux des clients. Nous partons avec trente chevaux. Quand nous rentrons, nous faisons Arezzo, ensuite le championnat d’Italie et Rome en juin. Et si tu as de bons résultats, tu peux monter de très beaux concours en été. Si tu ne fais pas le Global, ni les Coupes du monde, ce programme est très bien. Quand tu fais Rome, tu es déjà fin mai. Ensuite, il y a Barcelone en octobre, Vérone et la saison est déjà derrière. 

Vous montez aussi les jeunes en concours ? 

Je n’ai pas que des chevaux de haut niveau. J’aime aussi monter les jeunes, même les quatre ans, en concours. 

Vous n’êtes donc pas obsédée par le haut niveau ?

Non, j’aime tout. Par contre, je suis obsédée par les résultats et je suis très compétitive. Je suis très dure avec moi. Bien sûr, j’adore le haut niveau, mais j’aime faire bien tout ce que j’entreprends, que ce soit un CSI 5* ou un parcours avec un jeune. Par contre, je déteste aller au concours si je n’ai pas une chance de gagner. 

On se donne rendez-vous demain pour la suite de notre rencontre avec Giulia Martinengo Marquet !

Crédit photos : Oriane & Clement Grandjean