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Géraldine Hieronimus, la discrétion au service de l’excellence (1/3)

Interviews mardi 21 décembre 2021 Lea Tchilinguirian

Discrète, Géraldine Hieronimus est sûrement plus connue en étant associée à E2K Horses, une écurie réunissant élevage, sport et commerce. Un but puisqu’elle veut mettre en avant sa marque et non sa personne. Curieuse et hyperactive comme elle se définit, l’éleveuse et propriétaire souhaite davantage professionnaliser son écurie, de plus en plus en avant ces derniers temps notamment grâce à Marc Dilasser, qui emmène ses chevaux jusqu'en 5* dont le connu Abricot Ennemmelle (Quaprice Bois Margot), et Pierre-Marie Friant. 

Vous n’êtes pas issue d’une famille équestre, et pourtant la passion du cheval a toujours existé, de l’élevage au sport. Racontez-nous comment est né E2K Horses !

« Je pense qu’un jour, une petite fée s’est penchée sur mon berceau et je suis devenue absolument fascinée par les chevaux ! À l’époque, ce n’était pas si facile de monter à cheval à Reims mais j’ai trouvé un centre équestre dédié aux étudiants. J’ai rapidement obtenu mes galops et monté en concours jusqu’à 1,35m. À 25 ans, j’ai fait une mauvaise chute, mon cheval m’a écrasé la jambe et j’ai eu une fracture engendrant encore aujourd’hui des opérations. Je continue toujours de monter à cheval mais de manière moins intensive. J’ai aussi développé ma passion pour l’élevage et acheté une première jument AQPS que je montais. Dès qu’elle a commencé à être moins performante, je l’ai fait reproduire. J’étais fascinée par le fait de faire naître, de créer un croisement et de voir les résultats. En réalité, j’ai commencé assez tôt et ça n’a fait que s'intensifier d’année en année, en fonction des moyens que j’y consacrais petit à petit. J’ai commencé avec une AQPS et aujourd’hui j’arrive à acheter des chevaux de bon niveau. Mes premiers poulains sont nés il y a environ trente ans. J’ai toujours donné beaucoup de temps à mes chevaux en leur rendant visite, en allant voir les approbations d'étalons et en me déplaçant à l’étranger pour voir ce qui s’y passe, j’ai toujours été très curieuse. Je suis cheffe d’entreprise, j’ai une vie professionnelle en parallèle mais depuis deux ou trois ans, je m’investis davantage dans E2K Horses. Même si je l’ai toujours été, je veux que ça devienne encore plus performant ! Pendant le premier confinement - dû à la pandémie mondiale - j’ai voulu éclaircir tout ça avec un logo et une identité de marque, je pense qu’en tant que propriétaire et éleveur, on a tous envie que notre travail fait depuis des années soit reconnu et que tout le monde connaissent nos valeurs. Au Haras de Prieuré en Normandie, la structure des poulains est menée par Caroline Cancre, très dévouée aux chevaux. En termes de collaborations sportives, je travaille avec Marc Dilasser et Pierre-Marie Friant. »

Elika de Villier et François Pelamatti lors du championnats du Monde des sept ans en 1999. ©DR

Elika de Villier (Ruby Rouge) a un peu été comme la doyenne de votre élevage, de son histoire, et de votre envie de continuer.  

« J’ai sûrement eu de la chance, ou un bon œil, quand je l’ai achetée à trois ans à bas prix. Avec François Pelamatti, elle est vainqueur de la consolante des 7 ans lors du championnat du Monde en 1999. Personne ne connaissait encore trop cet événement en France, tout le monde se demandait pourquoi je voulais y aller. Comme tous les propriétaires, je pense que c’est très émouvant de voir une jument achetée jeune faire retentir la marseillaise sur un concours international, ça m’a aussi donné le goût de faire ça plus souvent. Je l’ai gardée près de vingt-sept ans, elle nous a quittés il y a quelques mois. Certains de ses poulains ont été de très bons performers, j’en ai vendu en Angleterre ou encore au Canada. »

Vous avez pour un leitmotiv “une écurie d'excellence”, un terme aussi précis que vaste. Qu’entendez-vous par là ?

« Je ne veux pas que ça paraisse prétentieux. On travaille avec des personnes qui ont le même état d’esprit : respectueux avec cette envie de bien faire. Selon moi, l’excellence rime avec trois mots : la confiance, l’exigence, la patience. Certaines écuries de commerce cherchent à vendre le cheval avant qu’il ait cinq ou six ans parce qu’après ça devient un autre sport et les coûts deviennent plus importants, nous ce n’est pas notre objectif. Nous voulons vraiment faire travailler le cheval en fonction de son physique et de ses envies, sans forcément faire les finales mais en le faisant progresser à son rythme. Notre leitmotiv est d’abord l’élevage, j’essaie de le faire avec les meilleures souches et je réussis à en acheter des prestigieuses. J’essaie d’avoir de bonnes juments pour avoir de bons chevaux sachant bien que que ce n'est pas miraculeux, qu’il y a peu de chance d’avoir un crack. Jusqu’ici, on a quand même réussi à avoir de bon chevaux sur les cycles classiques qui sont ensuite vendus dans de bonnes maisons. On fait aussi des concours pour avoir des performances mais quand on pense que le cheval est prêt et qu’on a une offre lui correspondant parfaitement, il est vendu. J’aime faire de l’élevage, faire évoluer les chevaux et une fois qu’ils sont prêts, les vendre. Tout le monde n’est pas comme ça, mais ça ne me dérange pas lorsque je peux choisir le nouveau cavalier. »

Marc Dilasser et Corona Z, fille de Queen of Lulu, évoluaient jusqu’en CSI 4*. Elle est maintenant sous la selle du mexicain Juan Jose Salinas Pasalagua.  ©Sportfot.com

Vous parlez de souches prestigieuses, depuis un moment vous travaillez avec celle d’Uélème, vers lesquelles autres vous tournez-vous ?

« Oui, je travaille avec celle d’Uélème depuis environ huit ans ! Avant, j’ai été chez Olivier Jouanneteau où se trouvaient justement mes chevaux d’élevage. Je voyais les poulains d’Uélème se faire débourrer et évoluer puis j’ai acheté une de ses filles, Queen of Lulu (Happy Villers). Elle a fait des poulains comme Corona Z (Crown Z). J’ai également acheté la propre sœur de Bibici à ses cinq ans, Vous Aime (Norman Pré Noir), que j’ai monté et avec qui j’ai fait des transferts d’embryons. J’ai aussi la souche de Monsieur Paris avec Heidi des Forêts (Number One d'Iso). Au début du mois, j’ai acquis le gagnant de la Körung à Verden, Chaclight (Chacfly x Sunlight), afin d’avoir des cartouches pour plus tard et faire progresser le cheval au haut niveau. »


Géraldine Hieronimus peut dorénavant aussi compter sur Chaclight pour écrire l’avenir.

Depuis plus de huit ans, vous collaborez avec Marc Dilasser, et plus récemment aussi avec Pierre-Marie Friant. Du jeune cheval au plus expérimenté, expliquez-nous ces collaborations.

« J’ai commencé par confier un cheval à Marc. À ce moment, je recherchais un cavalier respectueux, à l’écoute et avec de l’expérience pour un sept ans. Il venait de s’installer au Haras du Millénium, j’étais l’une de ses premières clientes. Nous avons ensuite été voir une jument à Verden, Cinderella (Clinton), que j’ai achetée et la collaboration a vraiment commencé à ce moment. Marc est autant passionné par les jeunes chevaux que par le sport de haut niveau, tous les cavaliers ne le sont pas ! Il connaît bien les souches, lorsqu’on voit un cheval qui nous plait, on a toujours le déclic en même temps. Il y a beaucoup de chevaux qu’on regarde mais à la fin, on est toujours d’accord ! Je m’entends très bien avec lui, on est tous les deux un peu hyperactifs. En dehors de tous les aspects équestres, il est intelligent et cultivé, c’est agréable de pouvoir aussi parler d’autres choses ! 

Marc Dilasser et Cinderella. ©Sportfot.com

J’ai rencontré Pierre-Marie grâce à Monsieur et Madame Bastin, les propriétaires d’Arioto*du Gesvres - cheval monté par Marc Dilasser -. Il a une partie de leurs poulains chez lui. Je trouve que c’est un cavalier très talentueux, j’adore la façon dont il monte les chevaux, il a un feeling incroyable et une bonne position. Je trouve ça bien d’aider une nouvelle génération, j’ai commencé par lui confier Cinderella avant qu’elle soit vendue. Il va aussi récupéré Magic one d'Anbri (Numbre One d'Iso), acheté aux ventes Fences, et en 2022  Cascada S (Cornets Iberio). »

Lorsqu’on est propriétaire de chevaux de haut niveau, c’est un certain coût financier et donc beaucoup d’enjeux. Comment choisit-on les cavaliers avec qui l’on travaille ? 

« C’est vraiment en connaissant les cavaliers, je vais chez eux et j’observe comment ça se déroule. Il faut que le quotidien se passe bien et que les chevaux soient bien. Honnêtement, on le voit vite. S’il va bien, a un œil totalement serein, un beau poil, vient vers nous et en plus, est bon en termes de performance, il n’y a pas vraiment de doute. Puis, je ne travaille jamais avec des personnes pour un an ou deux. Quand je donne ma confiance, je veux qu’elle soit respectée. Il faut aussi donner un peu de confort au cavalier et non qu’il se sente sur la sellette. Ils ont un travail tellement difficile, s’ils ont la sensation que du jour au lendemain le propriétaire peut enlever ses chevaux, ce n’est pas bon pour le quotidien. »

La suite de l’entretien avec Géraldine Hieronimus sera disponible dès demain. Nous aborderons le commerce.

Photo à la une : Jessica Rodrigues