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“En élevage, il faut suivre son intuition”, Pascal Knijnenburg (2/2)

Knijnenburg
Elevage jeudi 29 juin 2023 Adriana Van Tilburg

À seulement neuf ans, la jument KWPN Just Be Gentle, née chez Pascal Knijnenburg, a éclaboussé la saison hivernale de son talent. Sous la selle de Philipp Weishaupt, la fille de Tyson, né This Uno, et Be Gentle Verte a signé un coup de maître en s’emparant du Grand Prix 5* du Longines Global Champions Tour de Doha en mars, pour sa toute première apparition à 1,60m. Son histoire mène au couple formé par Pascal et Laura Knijnenburg, qui ont construit leur élevage avec leur cœur et leur âme. Rencontre.

La première partie de cet article est à (re)lire ici.

Humbles, discrets, travailleurs et parfois à contre-courant de certains de leurs pairs, Laura et Pascal Knijnenburg peuvent aujourd’hui savourer le succès de leurs protégés. “Nous étions déjà fiers de la réussite de Be Gentle Verte. Nous pensions que nous ne pouvions pas faire mieux, mais Just Be Gentle nous a prouvé le contraire ! Be Gentle était une jument remarquable. Elle s’est toujours bien comportée pendant sa formation sur le circuit national. Elle montrait ce que les gens voulaient voir. Elle avait un coup de dos phénoménal, et quittait très vite le sol au moment de la battue. Elle a suscité beaucoup d’intérêt. Nous lui avons donné le temps de mûrir dans le travail et d’atteindre des épreuves à 1,60m. Nous assurons l’éducation de nos chevaux aux Pays-Bas, et s’ils sont prêts, nous essayons de leur trouver le bon cavalier pour affronter une concurrence mondiale. Suivre de près la formation de nos chevaux est important pour nous. De cette façon, nous continuons à construire notre souche”, livre Pascal. 

Just Be Gentle en formation à Aix-la-Chapelle avec Philipp Weishaupt. © Sportfot

“Nous avons toujours suivi notre propre idée”

Chaque éleveur a son propre fonctionnement ; certains choisissent de vendre leurs foals, tandis que d’autres conservent leurs poulains quelques années de plus. C’est le cas de Laura et Pascal. “Nous essayons d’avoir autant de produits que possible de nos juments avant qu’elles ne se consacrent au sport. Elles sont très intéressantes pour l’élevage. Nous les laissons porter un poulain elle-même, et avons recours au transfert d’embryon pour le reste. Une fois, nous avons prélevé six embryons, mais cela reste unique”, développe le Batave. “En élevage, il faut suivre son intuition. Une fois que l’on a utilisé une certaine méthode à quelques reprises, on se forge sa propre expérience et sa propre opinion. Nous avons toujours suivi notre propre idée et avons utilisé à de nombreuses reprises des étalons qui n’étaient pas très appréciés des autres éleveurs. Par exemple, nous n’avons utilisé Cornet Obolensky (né Windows vh Costersveld, ndlr) qu’à deux reprises. Nous ne l’avons pas choisi pour sa popularité, mais parce qu’il semblait très bien correspondre à notre jument. Nous n’utilisons que des étalons qui peuvent apporter quelque chose à nos juments et nous essayons de sortir des sentiers battus. Je n’ai pas envie de faire comme tout le monde. De ce fait, nos chevaux ont des papiers différents. Ticallux Verte et Gentleman n’ont pas été beaucoup utilisés. Ils sont donc de bons candidats pour de l’outcross. Pour nous, les juments font 80% du travail. Nous réfléchissons donc à la façon dont leur sang peut se mélanger à celui de l’étalon, mais aussi à ce que sa présence puisse être intéressante dans une souche maternelle. Il y a beaucoup de mâles disponibles, mais si l’on procède à une vraie sélection, ils ne sont pas si nombreux à correspondre parfaitement à une jument donnée. Nous préférons voir les étalons en vrai, et si ce n’est pas possible, nous regardons autant de vidéos que possible. Aussi, nous ne vendons pas nos poulains. Nous avons évidemment des demandes pour nos meilleurs poulains, mais si on les vend tous, on n’atteint jamais le haut du panier en élevage. Au départ, cela a été coûteux, en temps et en argent. Cette stratégie implique aussi beaucoup de risques, mais cela en vaut la peine. Au fur et à mesure, il faut faire des choix. Garde-t-on ce cheval plus longtemps ? En vend-t-on une part à quelqu’un d’autre ? Le vend-t-on complètement ? Nous avons toujours eu notre vision des choses et tout cela n’est pas juste une coïncidence. Enfin, nous ne faisons pas de transfert d’embryons pour les vendre. Nous le faisons pour nous, pour notre élevage. Le fait que cela fonctionne est formidable.”

Avant de déployer ses ailes au plus haut niveau, Just Be Gentle a grandi entourée d'amour chez la famille Knijnenburg. © Sportfot



“Ludger Beerbaum m’a dit que Just Be Gentle lui rappelait Ratina”

Grâce à Be Gentle Verte, entre autres, la relève est assurée pour Laura et Pascal. Au moment de choisir un étalon pour leur pépite, les deux éleveurs n’ont pas dérogé à leur philosophie habituelle. “Tyson (Numero Uno et Kickyqueen x Voltaire, né chez G. Lindeboom et E.J. Meijer sous le nom de This Uno) concourait à 1,60m. On aurait pu penser qu’il était un peu too much pour Be Gentle Verte, car elle avait déjà énormément de puissance et de sang, des caractéristiques qu’avait aussi Tyson. C’était aussi un risque, parce que Tyson n’est pas le plus maniable et son dos est un peu faible. Heureusement, il n’a pas transmis ce défaut. Le produit de cette union n’est autre que Just Be Gentle. Pouliche, elle était magnifique, avait beaucoup de sang et d’énergie. Elle était beaucoup plus vive que Be Gentle Verte et nos autres chevaux nés cette année-là. Nous veillons à ce que nos poulains ne deviennent ni trop difficiles, ni trop virulents. Finalement, Just Be Gentle est très facile sous la selle. Sa lignée maternelle a donc été plus forte que l’influence de Tyson”, résume le naisseur de la brillante et immense jument, désormais âgée de neuf ans. “Nous avons investi beaucoup de temps auprès de Just Be Gentle. Elle était très remarquée, mais nous n’aurions jamais osé rêver du succès qu’elle rencontre aujourd’hui. Nous n’étions pas vraiment surpris, mais fallait-il encore que tout cela arrive. Parfois, elle se mettait en difficulté parce qu’elle était trop allante, mais sa souche maternelle produit des chevaux très intelligents.”

À chaque saut, Just Be Gentle ébloui son monde. © Sportfot

Alors que Just Be Gentle n’a pas encore soufflé sa troisième bougie, Ludger Beerbaum et son œil expert viennent l’observer, dans ses prairies natales. “Je croyais en elle et Ludger aussi”, assure Pascal. “Malgré tout, il faut être patient avant que tout se concrétise. Ludger m’a dit que Just Be Gentle lui rappelait Ratina, que toutes deux avaient quelques caractéristiques en commun.” Après seulement un an, Just Be Gentle, acquise en partie par Ludger Beerbaum, en collaboration avec les Knijnenburg, entre dans le top 3 des meilleurs jeunes chevaux du Kaiser. Ce dernier assure la formation de sa star, en intérim avec Philipp Weishaupt. “Nous souhaitions conserver une fille de Just Be Gentle. Cela a fonctionné et nous pouvons donc perpétuer sa génétique. Nous aurions pu la vendre plus tôt pour plus d’argent, mais nous ne voulions pas faire les choses ainsi. Parfois il faut savoir dire non, même à beaucoup d’argent. On prend le risque que quelque chose se passe, mais si on vend trop tôt, on n’a plus rien pour poursuivre l’élevage. La fille de Just Be Gentle a deux ans et est par Poker de Mariposa. Ses radios sont bonnes et elle a, à n’en pas douter, un truc en plus, même si le chemin est encore long. Nous sommes également ravis du contact que nous avons avec Ludger et Philipp. Ils nous informent des épreuves que Just Be Gentle saute et de son comportement. Avec Philipp, elle a fait énormément de progrès en peu de temps, jusqu’à gagner son premier Grand Prix à 1,60m à Doha. Il ne faut pas oublier qu’elle n’a que neuf ans ! Nous avons regardé ses parcours à la maison, avec quelques amis. Nous avions les larmes aux yeux lorsqu’elle a passé la ligne d’arrivée du barrage sans faute. Frederik de Backer a aussi dit de très belles choses à son sujet pendant le direct”, apprécie Pascal.

Just Be Gentle défend régulièrement, et avec succès, les couleurs de son équipe sur les étapes de la Global Champions League, comme ici à Stockholm. © Sportfot



Désormais, Just Be Gentle fait le bonheur de Christian Kukuk, dont le sponsor en a fait l’acquisition. “Nous sommes confiants avec l’écurie Beerbaum. Tout comme Philipp, Christian monte pour Ludger”, souligne l’éleveur. Sous la selle de son nouveau pilote, qui prend son temps pour achever sa formation, la perle de la famille Knijnenburg poursuit ses démonstrations, enchaînant clear round sur clear round. 

L’avenir

Même si Just Be Gentle n’en est qu’aux prémices de sa carrière au plus haut niveau, l’avenir se prépare déjà. Et Laura et Pascal ont les yeux rivés sur la nouvelle génération. “Nous avons notamment Must Be Gentle, un étalon de six ans par Gaillard de la Pomme et Just Be Gentle. Il est approuvé à l’AES et est stationné en Belgique pour la monte. Nous pensons qu’il sera un très bon cheval. Nous l’avons utilisé sur nos propres juments, et quelques personnes du coin lui ont aussi fait confiance. Il ressemble beaucoup à Just Be Gentle, mais version étalon. Ensuite, nous avons une jument de cinq ans très prometteuse à la maison : Nariva (Gaillard de la Pomme et Kariva x Caramba Verte). Sa mère, Kariva, est désormais chez Karel Cox et concourt jusqu’à 1,40m. Elle devrait aussi devenir une bonne compétitrice. Son père, Caramba Verte, est issu de la même lignée que sa grand-mère et a une poignée de produits. C’était aussi un étalon intéressant”, énumère le passionné. “Je pense que l’on peut dire que notre élevage progresse, tout en conservant du cadre dans le modèle de nos chevaux et beaucoup de sang.”

Kariva aux côtés de la famille Knijnenburg. © Dirk Caremans / Hippofotomedia

Pour Laura et Pascal, la suite passera aussi par une touche de diversification, avec l’arrivée d’un nouveau courant de sang. “Il y a trois ans, nous avons ajouté une nouvelle souche à notre élevage”, révèle le couple, à l’unisson. “Jusqu’alors, nous n’élevions qu’avec la lignée de Milo Opperhans. Sander Dingen est un ami et il est le propriétaire d’Hermione de la Pomme (Nabab de Rêve et Sauterelle de la Pomme x For Pleasure). Nous avons quelques-unes de ses filles, et même des petites-filles. C’est une souche qui a fait ses preuves, mais nous devons désormais montrer que nous pouvons réussir avec cette nouvelle génétique. Nous connaissons la production de Milo Opperhans par cœur. D’ailleurs, nous avons utilisé Must Be Gentle avec cette nouvelle souche, pour combiner les deux.” Pas de doute, l’avenir s’annonce radieux à Deurne.

Must Be Gentle incarne la relève de la voie mâle développée par les Knijnenburg. © Dirk Caremans / Hippofotomedia



Plan de monte 2023

- Apardi et Nariva (Gaillard de la Pomme)
- Cayetano et I’m Be Gentle (Donder)
- Cornet Obolensky et Hermione de la Pomme (Nabab de Rêve)
Lector vd Bisschop et Let’s Be Gentle (Luxor)
- Must Be Gentle et Pandora (Tangelo van de Zuuthoeve)
- Must Be Gentle et Wilo Opperhans (Indoctro)
- Must Be Gentle et No Nonsense (Numero Uno)

 Frappant, une autre réussite de l'élevage de Laura et Pascal. © Sportfot

Photo à la Une : Laura et Pascal Knijnenburg entourent Larissa Bjil, avec trois produits de l'élevage. © Dirk Caremans / Hippofotomedia