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À Bois-le-Duc, Richard Skillen a vécu un moment hors du temps (1/2)

Richard
Interviews vendredi 15 mars 2024 Mélina Massias

Ce jour-là, il n’est pas près de l’oublier. Aux côtés de Highway M TN N.O.P et Willem Greve, Richard Skillen a vécu un moment incroyable, en remportant le Grand Prix Rolex de Bois-le-Duc. Depuis un peu plus de deux ans et demi, l’Irlandais de trente ans prend soin des montures de l’actuel trentième meilleur cavalier du monde. Pour Studforlife, le sympathique et souriant groom revient sur son week-end en terres bataves, mais aussi sur son parcours rempli d’expériences plus riches les unes que les autres, les collègues et amis qui lui ont le plus appris et sur ses extraordinaires compagnons de route à quatre jambes. Première partie.

Richard Skillen a probablement vécu le plus beau moment de sa carrière de groom, dimanche 10 mars, grâce à Highway M TN N.O.P, son chouchou, et Willem Greve. Sous les yeux de son soigneur et sous la selle de son cavalier néerlandais, l’étalon de douze ans a réalisé un barrage complètement fou pour devancer de quatre tous petits centièmes les doubles champions du monde en titre, Henrik von Eckermann et King Edward Ress, le tout au sein d’une arène de de Bois-le-Duc bouillante. De quoi se créer un souvenir inoubliable. 

“Après un week-end comme ça et un tel dénouement, je ne peux pas me plaindre !”, sourit le sympathique groom. “Highway a été deuxième tellement de fois cette année que décrocher cette victoire était d’autant plus plaisant. Et puis il ne l’a pas fait face à n’importe quels couples. En voyant le barrage de King Edward et Henrik von Eckermann, tout le monde pensait qu’on pouvait directement lui donner le trophée. C’est incroyable.”

La victoire s'est joué à un crin - quatre centièmes de seconde - sur le dernier obstacle ! © Dirk Caremans / Hippo Foto

Décrocher une telle victoire n’arrive pas tous les week-ends, ni même tous les ans. Les heureux lauréats d’un Majeur du Rolex Grand Chelem de saut d’obstacles se comptent presque sur les doigts d’une main puisque seules quatre étapes annuelles composent ce circuit de prestige. Mieux encore, il ne suffit que d’un doigt pour compter le nombre de Néerlandais ayant triomphé dans l’un de ces rendez-vous depuis la création de cette série, en 2013 : un seul, nommé Willem Greve. Alors, prendre conscience de l’ampleur de la performance n’est pas toujours chose aisée. “Je crois que je commence à réaliser. Dimanche, au concours, tout le monde est venu me féliciter, mais lorsque je suis rentré à la maison et que j’ai commencé à ranger les affaires, je me suis arrêté pendant dix ou quinze minutes. J’ai compris que nous venions de remporter une épreuve du Grand Chelem. Lorsqu’on est seul, et que l’on a un peu de temps pour intégrer l’information, cela prend une autre dimension”, poursuit le jeune homme de trente printemps. 

L'ambiance de folie à Bois-le-Duc n'a fait qu'ajouté de l'émotion et du sens à la victoire de Highway, Willem Greve et Richard Skillen. © Dirk Caremans / Hippo Foto



Une victoire pleine de sens

Deuxième du Grand Prix Coupe du monde d’Amsterdam quelques semaines plus tôt, entre autres performances de haut rang ces derniers temps, Highway avait toutes les cartes en main pour signer un nouveau très bon résultat. Mais face aux meilleurs couples de la planète, difficile de prédire le dénouement de l’épreuve. “J’étais optimiste pour un sans-faute en première manche. Je savais que Highway pouvait le faire. Dès qu’il entre en piste, il se bat pour nous. En revanche, j’avais un peu plus de doute quant à l’issue du barrage. Willem a commencé à détendre pour le barrage, puis il a voulu aller voir Henrik et Martin en direct depuis le bord de piste, et pas sur la télé du paddock. Lorsqu’il est revenu, il m’a averti que le barrage se courrait très vite et m’a dit qu’il n’était pas sûr de pouvoir aller aussi vite. Je lui ai répondu : ‘ne t’inquiète pas, tu en es tout à fait capable. Tu crois en Highway, je crois en Highway et si tu veux, bien sûr que tu peux être aussi rapide’. Dès que la musique a commencé à retentir au barrage, j’ai eu des frissons. Je savais que les chronomètres seraient très serrés quoi qu’il arrive, mais c’était incroyable”, raconte Richard Skillen. Et de compléter : “On travaille dur dans ce métier. Faire partie de l’équipe qui gagne une telle épreuve prouve que notre travail et le temps que l’on passe avec les chevaux sont utiles. Toute victoire est appréciable, mais remporter une épreuve comme celle-ci, d’autant plus grâce à un cavalier néerlandais et face à un public néerlandais, rend le tout encore plus spécial. Je suis irlandais, mais j’ai ressenti l’adrénaline et l’effervescence. Je sais à quel point cette victoire compte. Les heures passées auprès des chevaux et les sacrifices concédés pour être à leur côté en valent la peine.”

Le bonheur de Richard Skillen et son chouchou Highway après leur triomphe à Bois-le-Duc. © Tiffany Van Halle / Vygo

À Bois-le-Duc, le public n’a pas été le seul à se montrer fantastique. Comme à Aix-la-Chapelle, Genève ou même Calgary, l’organisation a été impeccable et ce pour tout le monde. “C’est un super concours, l’un de mes préférés !”, assure celui qui prend soin chaque week-end de Highway, Grandorado, Pretty Woman van’t Paradijs ou encore Minute Man, né O’Neil van’t Eigenlo, les stars que monte Willem Greve. “Il s’agissait de la troisième fois d’affilée que je venais ici avec Willem et je suis toujours impatient à l’approche de cet événement. C’est un concours magnifique. Les écuries sont fantastiques, et on s’occupe très bien des grooms. Finir la saison indoor ici est toujours très chouette.” Pour ne rien gâcher au plaisir, Willem Greve s’est qualifié pour la quatrième fois de suite au barrage du Grand Prix, et pour la troisième fois, donc, sous les yeux de Richard. “Nous avons été deux fois sans-faute avec Grandorado avant cette victoire et en 2021 Willem s’était aussi qualifié pour le barrage avec Carambole”, précise l’Irlandais. 

Cerise sur le gâteau, Richard a reçu, lui aussi, une distinction, décernée par Rolex lors de la remise des prix. Une petite attention qui veut dire beaucoup pour ces rouages indispensables des sports équestres. “C’est chouette d’être apprécié et reconnu à la remise des prix. Sortir de l’ombre, être mis un peu en avant et ne pas toujours rester au second plan est agréable. Même si je n’aime pas trop être trop dans la lumière, ce genre d’attention est génial. C’est une jolie reconnaissance pour ce que nous faisons”, souligne l’intéressé, qui a pu profiter de ce moment amplement mérité. 

Le travail d'équipe a payé pour le trio magique Richard-Highway-Willem. © Dirk Caremans / Hippo Foto



De l’Irlande à Bois-le-Duc, “Richie” s’est forgé une solide expérience

Né en Irlande du Nord, à Newry, à une soixantaine de kilomètres de Belfast, “Richie” a grandi en montant à poney, puis à cheval, aux côtés de ses sœurs. Et c’est Ashley, sa sœur aînée, qui lui donne le goût du métier de groom. “Ashley est la groom de Greg Broderick. J’ai, en quelque sorte, raté mes études et Greg cherchait un groom pour un client américain. Grâce à Ashley, je suis donc parti en Floride pour un peu plus d’un an. Lorsque je suis rentré des Etats-Unis, je suis allé en Angleterre. J’aimais beaucoup ce métier et j’ai trouvé un poste chez Roger McCrea. J’ai travaillé là-bas pendant quelques années, puis j’ai eu envie de venir en Europe pour faire un peu plus de concours internationaux et engranger de l’expérience ici. J’ai eu la chance d’être embauché chez Harry Allen, qui venait juste de terminer ses années poney. J’ai groomé pour lui pendant trois ans et demi et j’ai vraiment apprécié cette expérience. Marlen (Schannwell, ndlr) était toujours la groom concours de Bertram à ce moment-là et j’ai énormément appris d’elle, que ce soit en termes de routine, sur le fait de laisser les chevaux être des chevaux, ou sa façon de faire les choses simplement. Je suis vraiment reconnaissant d’avoir travaillé à ses côtés. En tant que personne un peu stressée, c’est agréable de travailler avec quelqu’un comme Marlen, qui ne connaît pas le stress ! (rires) Juste avant d’intégrer l’équipe de Willem, j’ai également travaillé quelques mois chez Emma Augier de Moussac. J’y ai croisé Lisa Parkko, qui a groomé pour Maikel van der Vleuten. C’était une autre très bonne expérience. J’ai beaucoup après de Lisa également. Je pense qu’en grooming, l’apprentissage est infini”, détaille Richard, décrit par ses proches comme un ami et un groom d’un grand soutien. “Je pose toujours des questions à mes amis ; j’essaye d’apprendre et ils m’aident beaucoup. Je pense que nous nous entraidons tous. Ashley, ma sœur, Marlen et Lisa ont vraiment été trois grandes inspirations pour moi. J’ai appris les bases grâce à elles et j’applique encore leurs conseils et astuces tous les jours. J’ai retenu des choses de chacun de mes anciens postes. J’ai pris beaucoup de plaisir lorsque j’étais en Amérique. Découvrir le système américain était intéressant. Puis il y a eu ma période en Angleterre, où j’ai été entouré de jeunes chevaux. C’est aussi un bon souvenir. Et puis voir Harry passé des épreuves Junior à sa première victoire en Grand Prix 2* avec Izzy by Picobello était très cool. Parfois, les changements sont aussi bénéfiques.” Alors, voilà deux ans et demi, Richard s’est lancé et a rejoint l’équipe de l’un des meilleurs cavaliers de la planète équestre. Aux Pays-Bas, l’Irlandais s’est senti comme un poisson dans l’eau et a rencontré des chevaux qui l’auront marqué à tout jamais.

Richard Skillen a également travaillé pendant plus de trois ans auprès des chevaux du prodige Harry Allen. © 1 Clic Photo / Collection privée

La deuxième partie de cet article, où Richard évoque notamment sa relation avec Highway, est disponible ici.

Photo à la Une : La belle complicité entre Richard Skillen et son étalon, Highway, immortalisée lors de leur victoire à Bois-le-Duc. © Tiffany Van Halle / Vygo