Notre site web utilise la publicite pour se financer. Soutenez nous en desactivant votre bloqueur de publicite. Merci !

Le conseil des pros - Pieter Devos

Sport lundi 30 mars 2020

En cette période incertaine due à la pandémie de Covid-19, Studforlife vous propose de faire un tour d’horizon des différentes méthodes et techniques des cavaliers pour garder leurs chevaux en forme.

Pour ce quatrième épisode, le n° 6 mondial Pieter Devos nous explique son quotidien, bouleversé notamment en ce qui concerne l’entreprise familiale de fruits et légumes. Afin de répondre à une demande massive, le travail est conséquent. Ajoutez à cela le fait que le Champion d’Europe par équipe s’est cassé la main à Doha et monte donc moins que d’habitude.

Le report des Jeux Olympiques ayant été annoncé, la pression est évidemment moins grande pour les cavaliers : « Les chevaux sont travaillés tous les jours et comme on a de la chance avec une météo clémente ces jours-ci, ils vont tous les jours au pré. Ils font aussi énormément de promenades, notamment dans nos plantations d’arbres fruitiers. On continue de les travailler sur le plat. À mon avis, cette pause va durer assez longtemps, donc c’est important qu’ils restent dans le rythme quand même en sautant régulièrement. On prévoit des séances de saut environ une fois par semaine. On privilégie les petites gymnastiques, car pour le moment, on ne va pas demander de gros efforts. Pour moi, c’est très important pour le moral qu’ils aillent en balade, mais pas uniquement durant cette période. J’ai toujours mis un point d’honneur à ce que mes chevaux aillent beaucoup dehors. »

Pieter Devos sur Apart (Larino)

L’organisation pour les chevaux stars de l’écurie Devos est donc un peu allégée : « D’habitude, les chevaux de Grand Prix, on les monte sur le plat le matin et en promenade l’après-midi. Mais maintenant, on ne les monte pas deux fois par jour. On les monte en alternance en promenade ou au travail et ils vont au pré l’après-midi. On les laisse aussi prendre du repos. » Le programme de saut quant à lui, ne diffère pas pour l’instant : « Je ne saute jamais haut à la maison, je pense qu’il est important de garder les chevaux frais et bien dans leur tête. Il ne faut pas leur demander des exercices trop difficiles, ne pas compliquer les choses inutilement. »

Cette pause forcée permet aussi au cavalier belge de consacrer plus de temps aux jeunes chevaux de son écurie, bien qu’il monte encore peu pour l’instant puisqu’il s’est cassé la main lors du CSI de Doha : « Je ne savais pas que ma main était cassée, je pensais juste que mes doigts étaient tordus, mais après une semaine, cela faisait de plus en plus mal, donc on a fait une radio et on a découvert la fracture. Comme il n’y a pas de pression, je ne monte pas beaucoup pour que cela guérisse de manière optimale. J’ai recommencé à monter trois chevaux il y a quelques jours, mais ma main me fait encore souffrir, donc je ne vais pas me presser. Je profite donc d’aider mes cavaliers, notamment avec les jeunes chevaux, car nous avons un bon lot de jeunes. Ce sont ma femme et mes cavaliers qui les montent, mais j’ai la chance de pouvoir plus les aider qu’habituellement et de juger la qualité de nos jeunes chevaux. »

Pieter Devos & Clair Z (Cleaway)

Et la reprise des compétitions, comment l’envisage-t-il ? « À mon avis, cela ne va pas recommencer rapidement. Je pense que des 2* dans des installations fixes vont pouvoir recommencer dès que la vie normale aura repris son cours. Mais pour les 5*, cela va prendre du temps. Je ne vais pas faire des plans avant de savoir exactement quand on va pouvoir reprendre. Par contre, dès qu’on le saura, on fera un planning pour que les chevaux arrivent à nouveau en forme lors des échéances. Ils referont probablement un ou deux petits 2*. Mais il faut attendre de voir comment la situation évolue. »

Le report des Jeux olympiques est aussi une nouvelle donnée à prendre en compte pour le jeune père : « Évidemment que c’est moins de pression, mais je suis un sportif, je préférerais qu’il y ait cette pression. Je pense néanmoins que le CIO a pris la meilleure décision. Sur le plan personnel, je suis évidemment déçu, car j’avais établi un programme bien précis pour Claire, que je pensais emmener aux JO. Après Genève, elle a eu droit à une pause de trois mois, pour qu’elle puisse revenir dans une forme optimale. Je pense qu’elle aurait été en forme pour cette saison, mais je ne doute pas qu’elle sera aussi très compétitive l’année prochaine. Et c’est pour tout le monde la même chose. Maintenant, le plus important, c’est la santé des gens, elle doit passer en priorité, avant le sport et avant l’économie. »

Pieter Devos rappelle aussi qu’il n’y pas que le sport qui est impacté par ces décisions, l’ensemble de toute la filière équestre est touché : « En cette période, il n’y a aucune rentrée financière. Dans le cas de mon écurie de sport, les entrées financières proviennent des gains lors des concours. On ne peut plus vendre de chevaux non plus, tandis que j’ai quand même pas mal de personnel et de nombreux frais fixes. C’est une situation délicate. Mais n’oublions pas que nous sommes privilégiés parce qu’on peut toujours entraîner les chevaux et continuer de former les jeunes. D’autres sont confrontés à une situation bien pire. Il y a certes moins de commerce, mais les chevaux ne perdent pas pour autant leur valeur. Il y a d’autres entreprises qui, à la fin de la crise, n’auront plus de valeur. »

Pieter Devos chez lui en 2008

L’entreprise familiale, active dans le domaine des fruits, accapare presque l’entier du temps du champion d’Europe par équipe : « Je suis inondé de travail. Dans l’alimentaire, on a aussi une responsabilité envers la population. On fait tout pour que l’entreprise continue de fonctionner pour approvisionner les supermarchés et pour que les gens continuent à avoir à manger. On travaille avec des ouvriers polonais, qui voulaient rentrer chez eux, donc on a dû beaucoup œuvrer pour qu’ils restent. Je ne vais pas me plaindre, car on peut encore travailler alors qu’il y a beaucoup de secteurs qui sont plus touchés que nous. Mais ce sont des circonstances difficiles. En tant que directeur commercial, j’essaie de gérer au mieux cette crise. Heureusement, je peux compter sur une très bonne équipe autour de moi. » D’importantes mesures sanitaires ont été prises pour garantir la sécurité de toutes les personnes qui travaillent dans l’entreprise : « Il n’y a plus de gens de l’extérieur qui peuvent rentrer sur le domaine, et on ne fait plus de réunions. »

La main-d’œuvre vient aussi à manquer, comme dans toutes les exploitations agricoles : « Si tu n’as pas d’ouvriers, l’entreprise ne fonctionne pas. C’est difficile à gérer, on essaie de trouver des solutions pour avoir assez de gens. Maintenant, on est encore en hiver donc ça va, mais dans quelques semaines, le travail dans les plantations va débuter et il faudra trouver de la main-d’œuvre. Il y a beaucoup de gens qui sont repartis à la maison et ceux qui devaient revenir, pour le moment, ne reviennent pas. Ils restent dans leur pays, ce qui est normal, mais on se retrouve en pénurie de main-d’œuvre. La solution n’a pas encore été trouvée. On est en train de voir si on peut mobiliser des gens de la région, former une équipe pour travailler dehors. On ne veut pas que les gens se mélangent pour éviter de faire prendre des risques à nos employés. »

De nombreux défis et des incertitudes auxquels doivent faire face Pieter Devos et son staff.